LE CHEMIN RIVIÈRE-AUX-GLAISES

 

Nous avons vu le mois dernier avec le Chemin des Caron une romancière qui s'est inspirée de faits vécus pour vous raconter l'arrivée de la famille Caron à Yamachiche.

Renoncez à lire ce qui va suivre si vous n'avez pas encore savouré les romans de Pauline Gill dont l'intrigue se déroule à Yamachiche:

 

·        Le Château retrouvé

·        La Cordonnière

 

L'histoire s'inspire de personnages et d'événements réels, l'auteur est du genre à se taper 4 mois de recherches pour nous décrire en un seul paragraphe une technique, un état d'âme, une action comme à l'époque.

Cette femme admirable a su faire revivre le Yamachiche d'autrefois, celui de la belle époque d'avant 1900 et n'ayez crainte, ses personnages ont bel et bien existé.

Abandonnez donc vite cette lecture pour lire d'abord les romans de Madame Gill.

En ce qui me concerne, éditeur oblige (...)

Yamachiche s'étend aujourd'hui sur une superficie d'environ 100 kilomètres carrés dont la particularité des sols, majoritairement, est de compter sur une couche en surface de 3 à 4 pieds de terre qui reposent sur une immense éponge de glaise d'une profondeur de 180 pieds.

De la glaise et encore de la glaise.  Une immense éponge de 180 pieds d'épaisseur de glaise, ou ne serait-ce pas plutôt de l'argile?

C'est que Yamachiche, c'était la mer de Champlain il y a de cela à peine un millier d'années, une mer dont les berges étaient probablement là où se situent les maisons du Chemin des Caron.

Il serait donc là le premier chemin d'Yamachiche, le passage à pied qui longeait la mer de Champlain qui, en se retirant, laissa 2 rivières navigables dont les embouchures étaient fort convoitées.

Le territoire où se situent ces 2 rivières était fort intéressant pour y attirer des familles et c'est sans doute ce que comprit Pierre Boucher en acquérant le fief Grosbois.

Il divisa même son fief en 2 parties qui correspondaient à nul autre chose qu'à l'embouchure de chacune des 2 rivières.

Il y aura donc le fief Grosbois Est, celui de l'embouchure de la Grande Rivière Yamachiche, le Grand Machiche, où il établira ses neveux, les Lesieur-Desaulniers-Duchesne qui, plus tard, accueilleront plus au nord les familles Acadiennes.

Il y aura également le fief Grosbois Ouest, celui de l'embouchure de la Petite Rivière Yamachiche, le Petit Machiche, où s'établiront les Gélinas-Bellemare qui, plus tard, avec Conrad Gugy, accueilleront plus au nord la famille Caron.

Du côté de Pointe-du-Lac, une toute petite partie du Yamachiche d'aujourd'hui n'était pas incluse dans le fief Grosbois.  Le fief Gatineau est facile à identifier de nos jours puisque sur sa ligne séparative d'avec le fief Grosbois on peut apercevoir 2 immenses buttes de terres qui étaient destinées à une sortie de l'autoroute 40, projet qui fut remplacé par la sortie actuelle 180, celle du Canton.

Cette petite partie d'Yamachiche avait été acquise pour le fils de Pierre Boucher qui n'y fit aucun établissement et le vendit en 1712 à Louis Gatineau, dit Duplessis.

En 1723, Louis Gatineau déclara qu'il n'avait pas encore d'habitants dans sa seigneurie.

Il faut tenir compte du fait que la rivière-aux-Glaises n'était pas un cours d'eau assez important , assez volumineux pour attirer des colons et que la famille Gatineau habitait Batiscan et que leur grenouillère d'Yamachiche n'était pas des plus attirantes.

Ceux qui s'établiront au Chemin Rivière-aux-Glaises transformeront la grenouillère hautement inondable, plusieurs décennies plus tard, en des terres qui furent considérées comme le grenier d'Yamachiche, le compliment ultime à une certaine époque pour évoquer la richesse des sols.

Il demeure toutefois que ce chemin est l'un des premiers chemins d'Yamachiche puisque le futur chemin du Roi qu'on envisagera le 9 juin 1732, devait passer par l'ancien chemin Rivière-aux-Glaises.

Plus précisément, il s'agissait du Chemin de la Concession de la Rivière-aux-Glaises puisqu'on se rendait alors dans un secteur où les résidants avaient tout simplement tracé un chemin pour se rendre d'une propriété à l'autre.

Cette voie publique, entre propriétaires, avait la particularité d'être située dans une zone de fréquentes inondations printanières, d'autant plus que la coupe des arbres, le long du fleuve Saint-Laurent, élargissait d'années en années la zone inondable.

En 1865, l'inondation fut tellement spectaculaire, la tempête qui l'amena si terrifiante, que pas moins de 14 familles jugèrent plus prudent de relocaliser illico leurs bâtiments et résidences plus au nord afin de se soustraire aux terribles débordements annuels des eaux du Lac Saint-Pierre.

Le chemin fut définitivement abandonné en 1878 et on le relocalisa plus haut, ce qui correspond à l'actuel Chemin Rivière-aux-Glaises et à la route 138 (qui fut déplacée de quelques mètres plus au sud par la suite).

Le déplacement de ces 14 familles et l'abandon de la vieille route eurent le même effet dévastateur que l'ouverture de l'autoroute 40 qui a fait dévier tout le trafic qui circulait autrefois par la route 138.

Les gens se mirent cette fois-là à circuler plus au nord et les habitants qui étaient regroupés près de l'embouchure de la Grande Rivière Yamachiche se retrouvèrent isolés.

Malgré un retentissant procès où ils échouèrent dans leur tentative de garder le vieux chemin ouvert, le village du Canton se mit à décroître passant au fil des ans de 42 familles à une quinzaine.

Déjà que la relocalisation de l'église au village actuel avait porté un coup dur, souvenons-nous que 1878, c'est aussi l'année où le train circula pour la 1ère fois à Yamachiche, rendant désormais inutile le transport par bateaux, ce que comprit rapidement la Compagnie Richelieu qui cessa définitivement d'utiliser le quai de la Grande Rivière Yamachiche.

Le nouveau chemin Rivière-aux-Glaises, en étant "l'ancêtre" de l'actuelle route 138, rendait ainsi inutile le passage par le Canton qui perdit son titre de Village au détriment du village actuel.

Le Petit Machiche des Gélinas-Bellemare l'emportait enfin sur le Grand Machiche des Lesieur-Desaulniers-Duchesne en devenant le point central de la communauté.

En ce qui concerne les résidants du Chemin Rivière-aux-Glaises, allez donc vous procurer les romans de Madame Pauline Gill, c'est là la meilleure et la plus agréable façon de les connaître.

 

 

 

Paul Desaulniers

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