Le Nouvelliste 9 octobre 1999

Camelot depuis 22 ans
Mme Lise Gauthier se lève à 3h 30 pour livrer le journal à 290 abonnés

Brigitte Trahan
Yamachiche

Qu'il soit tombé 5 mm de verglas ou 40 cm de neige, ni froid, ni les routes enneigées, ni même la grippe ne
sont venus à bout de Mme Lise Gauthier. Chaque matin vers 3 h 30, du lundi au samedi, pendant que tout le monde dort encore, elle brave les éléments pour s'assurer que 290 abonnés du Nouvelliste à Saint-Sévère, Saint-Barnabé-Nord et Charrette aient leur exemplaire du journal à la porte avant 6 h 30. Il lui faut trois heures en hiver et 2 h 30 en été pour accomplir sa tâche. Dans les secteurs plus urbanisés, comme au village de Saint-Barnabé, elle livre 90 de ces journaux à pied.

Mme Gauthier fait ce travail de puis 22 ans et n'a jamais manqué une seule journée de livraison, «sauf lorsque j'ai pris deux semaines de vacances, une fois, il y a 17 ans», dit-elle. «J'ai même déjà livré le journal avec une bonne bronchite. Il n'y a rien pour m'arrêter. Je me dis que le jour où je ne serai plus capable de donner de service, je serai aussi bien de rester chez moi», fait- elle valoir.


(Photo Alain Bédard)
Mme Lise Gauthier en a vu de toutes les couleurs dans son travail.

Mme Gauthier s'occupe aussi de distribuer le courrier dans les mêmes secteurs ou elle livre Le Nouvelliste. Après avoir terminé son circuit de journaux, elle se transforme donc en facteur. «Je peux vous dire que ça me coûte cher pour ma voiture. Juste pour Le Nouvelliste, je roule 48 000 km par année. Je ne compte pas ce que je roule pour la poste en plus. Je dois arrêter constamment pour déposer le journal, puis je repars, puis j'arrête, puis je repars; cela fait que ça me coûte quatre pneus d'hiver et quatre pneus d'été chaque année. Je suis obligée de changer mes freins aux deux mois, sans compter ce que ça fait à ma transmission. Je dois donc changer de véhicule aux deux ans», raconte- t-elle.

«J'avais commencé à livrer le journal lorsque mon beau-père avait laissé son circuit. J'avais 179 abonnés dans ce temps-là. Je ne devais faire ce travail que pendant deux ans... et ça fait 22 ans», dit-elle. «Aujourd'hui, 290 exemplaires, ce n'est rien. J'ai déjà eu 360 abonnés», se souvient-elle.

Il doit y avoir un Bon Dieu pour les camelots puisque Mme Gauthier connaît très bien M. Guy Boucher qui déneige toutes les rues où elle fait la livraison du journal.

«Ça adonne bien, parce qu'il passe juste avant moi quand il y a des tempêtes, même si c'est très tôt le matin. Son frère Louis, lui, fait les entrées privées. Ça m'aide parce que je vais aussi dans plusieurs entrées privées en auto pour livrer les journaux. J'ai en effet quelques clients âgés que je gâte beaucoup. Je vais porter le journal entre les deux portes, chez certains d'entre eux, parce qu'ils sont trop âgés pour se rendre jusqu'au chemin, à la boite aux lettres», dit-elle.

Parce qu'elle a longtemps vécu à Saint-Barnabé-Nord, Mme Gauthier considère presque ses clients comme de la famille. «Je suis souvent la seule visite que certaines personnes âgées reçoivent dans la semaine quand je vais faire payer le journal», raconte-t-elle. Elle connaît très bien leurs habitudes et garde même un oeil attentif aux résidences de ceux qui sont partis en vacances. «Une fois, je suis arrivée chez un client pour lui livrer son journal et je trouvais curieux qu'il ait laissé sa lumière extérieure ouverte. J'ai trouvé un manche de hache plein de sang dehors et je suis entrée pour voir ce qui se passait. Le monsieur était ensanglanté. Il avait été attaqué par des voleurs mais il était encore vivant. Je me suis rendue chez son neveu, de l'autre côté de la rue, pour chercher du secours.»

Évidemment, il s'agit de très rares mésaventures et Mme Gauthier en a vécu de plus gaies durant toutes ces années. «J'avais un client, M. Herménégilde Rivard, qui avait dressé son chien pour venir chercher le journal dans mes mains. Le chien me voyait venir quelques maisons plus loin et il m attendait. Son maître lui avait fabrique un petit manteau sur lequel il était inscrit Le Nouvelliste. C'était mignon a voir »

Mme Gauthier admet que l' arrivée de l'automne a toujours le même effet sur elle. «Je vois l'hiver arriver et je me dis toujours que je vais lâcher, cette fois-là. Mais finalement, je m'habitue et j'affronte l'hiver jusqu'à ce que les journées recommencent à allonger et que ce soit à nouveau plaisant d'aller dehors. »

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