Le Nouvelliste 3 juillet 2012

 

Boîtes à jus: le recyclage prend un lent démarrage


Les campagnes d'appui au recyclage des contenants multicouches se poursuivent, entre autres auprès des écoliers.

PHOTO RON BULL, LA PRESSE CANADIENNE


Charles Côté

La Presse

 

On met souvent des boîtes à jus et d'autres contenants «multicouches» dans les boîtes à lunch et ils portent fièrement leur logo «recyclable», mais leur recyclage connaît un démarrage difficile au Québec.

En attendant, ces contenants, dont le plus grand fabricant est le géant suédois Tetra Pak, sont exportés en Chine et aux États-Unis.

Une usine de recyclage située à Yamachiche, en Mauricie, doit démarrer aujourd'hui, après plus d'un an de retard en raison de problèmes d'équipement.

«Malheureusement, un de nos équipementiers qui nous avait promis mer et monde n'a pas rempli ses engagements, affirme Michel Camirand, président-directeur général du Groupe RCM. Il a fallu faire plusieurs modifications. On va avoir 14 ou 15 mois de retard sur l'échéancier prévu. Ce sont les aléas quand on est dans un domaine nouveau.»

L'usine de RCM, société sans but lucratif, a reçu une subvention de 600 000$ du gouvernement du Québec. Au total, le projet d'usine de recyclage de contenants multicouches aura coûté 5 millions et devrait permettre de créer de 25 à 30 emplois.

Une résine plus flexible

«Inutile de vous dire qu'on piaffe d'impatience, dit M. Camirand. Mardi prochain, on sera en mesure de commencer les opérations avec la formation des opérateurs.»

Mais le succès de RCM n'est pas assuré. L'usine innove en produisant des granules, obtenus en mélangeant les contenants multicouches avec de la pellicule plastique récupérée.

«On fabrique une résine qui intègre toutes les matières qui composent le Tetra Pak, dit M. Camirand. On en fait entre autres des pots à fleurs. C'est une résine plus flexible, moins cassante.»

C'est une toute nouvelle approche pour ces contenants composés de carton à environ 75%, de plastique et d'aluminium. Cet assemblage de trois matières en cinq couches différentes rend leur recyclage plus difficile, même pour les entreprises les plus expérimentées.

«On a fait des tests dans une de nos usines, dit Hubert Bolduc, de Cascades. On a dû investir 250 000$. Mais ça n'a jamais marché. Il y avait trop de pertes: 50% environ des fibres de carton étaient perdues.»

Cascades est l'un des acheteurs potentiels des granules de RCM, mais là encore, la partie n'est pas jouée. «On fabrique du mobilier urbain en plastique recyclé, dit M. Bolduc. On fait des tests avec les billes que RCM produit. On essaie de voir si on peut les utiliser, mais jusqu'à maintenant, c'est non.»

Taux de récupération

Élisabeth Comere, directrice, environnement et affaires gouvernementales pour Tetra Pak en Amérique du Nord, insiste sur la facilité de recycler ces emballages.

«Les recycleurs vous le diront, le processus est simple et il fonctionne, dit-elle. Avec des sources mécaniques et de l'eau, on sépare les couches. On récupère la fibre d'un côté et le reste d'un autre côté.»

Pendant ce temps, les campagnes d'appui au recyclage des contenants multicouches se poursuivent, entre autres auprès des écoliers.

L'organisme Québec'ERE  propose ainsi une exposition sur mesure pour les élèves de 5e et 6e année, où les enfants sont invités à animer des stands expliquant l'A B C de la récupération, y compris celle des contenants multicouches.

Mme Comere, de Tetra Pak, reconnaît qu'il y a «un vrai défi pour l'industrie des cartons multicouches» sur le plan de la collecte. «Au Canada, on a un taux de récupération d'environ 38% pour tous les cartons réunis», dit-elle.

«On a un programme particulier pour les multicouches, dit Barbara Genest, directrice générale de Québec'ERE. On explique en quoi peut être récupéré un contenant multicouches. On explique aux citoyens qu'ils sont récupérables. Pour moi, ce n'est pas de la théorie parce c'est possible. Quand un centre de tri dit qu'il le ramasse, il ne l'envoie pas à l'élimination.»

«Parfois, la ligne est mince entre l'éducation et l'écoblanchiment, estime Karel Ménard, directeur général du Front commun québécois pour la gestion écologique des déchets (FCQGED). Le Tetra Pak, par définition, est jetable et difficilement recyclable. Je sais qu'il a certains avantages sur le plan du poids et du transport. Mais on n'est même pas sûrs de la façon dont il est recyclé.»

«La meilleure chose, c'est d'avoir un contenant réutilisable, reconnaît Mme Genest. Mais les gens ne font même plus la cuisine! Alors, à défaut de prendre un contenant réutilisable, le meilleur choix, c'est ce contenant recyclable, s'il l'est dans la région.»

Taux de récupération dans le secteur résidentiel

Contenants à pignon: 66%

Tetra Pak et autres aseptiques: 52,6%

(Source: Recyc-Québec, 2010)


 

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