Le Nouvelliste 23-24 août 2008

Consacrer sa vie à Dieu

Soeur Lucie Gélinas, originaire de Yamachiche,
célèbre ses 50 ans de vocation religieuse

Mario Goupil
La Tribune

Richmond — Il y a 50 ans cette semaine, la petite Lucie Gélinas quittait pour de bon sa famille et le village de Yamachiche pour devenir religieuse au sein de la congrégation de Notre-Dame. Elle n'avait que 20 ans et venait de passer deux années au Noviciat. C'était bien jeune pour choisir de consacrer sa vie à Dieu.

«Ce n'est pas moi qui a fait ce choix, se défend-elle aujourd'hui. C'est plutôt le Bon Dieu qui m'a choisie.»


Même son défunt père trouvait son bébé bien jeune pour prendre une telle décision. Il avait déjà vu un autre de ses filles, Louise, embrasser la vocation religieuse.

«Quand j'ai annoncé la nouvelle à mon père, il avait répondu que je ne resterais pas chez les religieuses parce que j'étais trop gâtée. Moi, je dirais plutôt que j'ai été choyée», confie la jubilaire.

Quitter la vie religieuse, c'est quelque chose qu'elle n'a jamais envisagée, même si elle avoue s'être déjà imaginée mariée.

«Mais je n'ai pas de regrets, surtout quand les couples viennent me raconter leurs histoires...», poursuit-elle en riant de bon coeur.

Une seule fois elle a failli demander à sa congrégation de la libérer pour un certain temps afin de rentrer auprès des siens.

C'est que le jour de son 21e anniversaire de naissance, ses parents, deux de ses frères et une de ses soeurs sont venus lui rendre visite au Collège du Mont Notre-Dame à Sherbrooke, où elle enseignait. Sur le chemin du retour, à la hauteur de Saint-Cyrille, la famille Gélinas a été impliquée dans un très grave accident de voiture. Une violente collision frontale.

«Ce n'est que le lendemain que la directrice m'a fait venir à son bureau pour m'annoncer la nouvelle, raconte soeur Lucie. Elle m'a informée qu'un membre de ma famille était décédé, mais elle ne savait pas lequel. Tous les autres avaient été sérieusement blessés.»
Soeur Lucie Gélinas
PHOTO LA TRIBUNE
Soeur Lucie Gélinas

Une fois en congrégation, les religieuses n'étaient pas supposées pouvoir retourner dans leur famille. La jeune religieuse a cependant reçu une permission spéciale ce jour-là. Elle a pris le premier autobus, en pleurant, pour se rendre au chevet des siens à l'hôpital.

C'est en arrivant à l'étage où reposaient quatre des membres de sa famille qu'elle a constaté que seul son frère Claude, 31 ans, un père de deux jeunes enfants, manquait à l'appel. C'est lui qui était mort dans l'accident.

«On m'avait permis d'aller au salon funéraire et d'assister au service funèbre. J'avais aussi écrit à celle qui m'accompagnait chez les novices pour lui demander conseil. J'envisageais de rentrer à la maison pour aider ma famille, mais elle m'avait conseillé de m'en remettre à la Providence. Finalement, je n'ai pas en à retourner pour aider les miens. Tout s'est arrangé.»

40 ans dans l'enseignement
Soeur Lucie a enseigné pendant deux ans au Collège du Mont Notre-Dame de Sherbrooke avant de relever un nouveau défi à Richmond, toujours dans l'enseignement, à la demande de sa congrégation.

Après 40 ans dans le monde de l'enseignement, et après avoir oeuvré dans trois écoles différentes de Richmond, elle a pris sa retraite il y a 10 ans.

«J'avais 60 ans d'âge et j'enseignais depuis 40 ans. Au total, cela faisait 100 ans. Un centenaire, ça se fête et je l'ai fait en prenant ma retraite!» raconte-t-elle.

Soeur Lucie n'a donc jamais quitté Richmond et celle ville pourrait difficilement se passer d'elle tellement elle est impliquée dans sa communauté. Elle s'est toujours consacrée à son rôle d'éducatrice.

À la retraite, soeur Lucie a même demandé et obtenu les clés d'une école désaffectée où elle a organisé différentes activités à l'intention des jeunes. Encore l'an dernier, après chaque jour de classe, elle aidait six jeunes du primaire à faire leurs devoirs et à apprendre leurs leçons.
«On fait comme sainte Marguerite Bourgeois, fondatrice de notre congrégation, en répondant aux besoins autour de nous», explique soeur Gélinas.

À 70 ans, Lucie Gélinas est l'une des quatre dernières religieuses de la congrégation de Notre-Dame que l'on retrouve encore à Richmond. Elle vit maintenant seule en appartement.

C'est une femme qui sait également être bien de son temps. A preuve, elle s'apprêtait à quitter à bicyclette pour Danville une fois l'entrevue complétée. Une petite balade de quatre heures, aller-retour. Et l'hiver, soeur Gélinas s'offre des randonnées en skis et en raquettes.

«Il faut bien se garder en forme», plaide la religieuse.

Surtout si, comme elle, on n'a pas l'intention de ralentir.•

 

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