Le Nouvelliste 8 janvier 2008
«Ça va tuer les pourvoiries»
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Claude Desaulniers, Roland Lévesque et
Nancy Plante continuent d'installer des cabanes sur le
lac Saint-Pierre, même si la clientèle de la pourvoirie
Qui Maur-Icie a diminué.
Photo: Stéphane Lessard
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Paule
Vermot-Desroches
Louiseville
Quand on se promène sur le lac Saint-Pierre ces
jours-ci, on constate facilement que le nombre de cabanes de pêche a
diminué par rapport aux années passées.
Et avec une glace de près de 18 pouces
d'épaisseur, ce n'est certainement pas le redoux qui freine les
amateurs de pêche sur glace à descendre leur chalet de pêche sur le
fleuve, à la hauteur de Yamachiche.
En fait, les conditions imposées depuis le 1er janvier 2007 par
l'Aire faunique communautaire (AFC) du lac Saint-Pierre continuent
de faire des mécontents, si bien que plusieurs amateurs de pêche ont
choisi de changer de place ou même d'abandonner tout simplement ce
loisir.
Selon Claude Desaulniers, propriétaire de la pourvoirie Qui
Maur-Icie, à Yamachiche, sa clientèle a baissé de plus de 30 %
depuis l'implantation de ces nouvelles conditions, qui prévoient
notamment un tarif supplémentaire de 12 $ par saison ou de 3 $ pour
une journée pour pêcher sur le lac, ainsi qu'un quota établi à 10
perchaudes par jour par pêcheur.
L'ennui, c'est qu'une fois le pont Laviolette traversé en direction
de Québec, les conditions de l'AFC ne s'appliquent plus. Les
pêcheurs n'ont pas à payer les frais supplémentaires, et peuvent
pêcher jusqu'à 50 perchaudes par jour.
"À 20 kilomètres d'ici, ce n'est pas la mer à boire. Les pêcheurs
quittent et vont s'installer de l'autre côté du pont, à
Sainte-Angèle-de-Laval", constate M. Desaulniers.
"Déjà qu'il faut payer les ménés, les trous, les lignes, le droit de
passage et le permis de pêche, on nous fait payer encore pour un
permis spécial. Ça n'a plus de fin", ajoute-t-il.
Ce qui indigne d'autant plus ce pourvoyeur, c'est que les
engagements pris par le gouvernement en lien avec l'AFC n'auraient
toujours pas été respectés, affirme-t-il.
D'abord établie pour gérer la pêche sportive, l'AFC souhaitait aussi
permettre de restaurer les stocks de poissons dans le lac
Saint-Pierre. Or, selon M. Desaulniers, le gouvernement s'était
engagé à diminuer la pêche commerciale, ce qui n'a pas été fait.
"Nous n'avons rien contre les pêcheurs commerciaux, et c'est une
bonne chose qu'il y ait de la surveillance faite par l'organisme qui
gère l'Aire faunique. Mais actuellement, si on veut survivre, il
faudrait abolir l'AFC, ou alors étendre les conditions imposées aux
pêcheurs au-delà du lac Saint-Pierre. Si le ministère des Ressources
naturelles et de la Faune ne s'occupe pas de faire abolir l'Aire
faunique, ça va tuer les pourvoiries", clame Claude Desaulniers.
Même son de cloche du côté de Baie-du-Fèbvre, où Jean-François
Lemire qui possède son propre centre de pêche notait une diminution
de clientèle de 15 % à 20 % l'an dernier. Et sa saison 2008 n'est
même pas encore commencée.
"En plus de l'AFC, on connaît de plus en plus des hivers doux. On
ouvre plus tard parce que la glace n'est pas belle, et ça ne nous
laisse que cinq semaines pour être en activité. Si en plus notre
clientèle s'en va à cause des conditions de l'AFC, on se demande
comment on va s'en sortir", lance-t-il.
Pour les municipalités entourant les pourvoiries du lac
Saint-Pierre, la présence des pêcheurs représente souvent une
importante source de profits pour les commerces locaux, fait
remarquer Claude Desaulniers.
Mais malgré cela, les conditions actuelles réservées aux pêcheurs
sur le lac Saint-Pierre ne peuvent que le pousser à une grande
réflexion sur son avenir.
"Si ça continue comme ça, on va sans doute accrocher nos patins
l'année prochaine", lance-t-il.
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