Le Nouvelliste 6-7 janvier 2007

Sable et sel plus populaires que la souffleuse
 
Trois-Rivières — Mortes de rire, les entreprises de déneigement? Compte tenu du climat qu'il a fait en décembre et de la tendance que prend janvier, elles ne sont sorties que deux fois, depuis la première chute de neige, pour déblayer les entrées privées et les stationnements de commerces. Mais contrairement à ce qu'on pourrait penser, l'ouvrage est au rendez-vous quand même: «Il y a plus de verglas, ça gèle la nuit. Il faut donc mettre plus de sable et de sel», plaide Paul Fournier. En 30 ans de métier, cet employé de Déneigement Neault a rarement vu un hiver se pointer de la sorte alors que la majorité des précipitations ont été sous forme liquide jusqu'à présent.
 
Yvan Ducharme de Déneigement TRO estime qu'il est encore beaucoup trop tôt pour présumer que les déneigeurs auront la vie plus douce, cet hiver. «L'an passé, on était sorti quatre fois en décembre. Cette année, deux fois. Mais l'hiver n'est pas fini. En janvier, l'an passé, on était sorti 15 fois», rappelle M. Ducharme, fort de ses 23 ans de métier.
 
En moyenne, dit-il, les déneigeurs doivent se mettre au boulot25 fois durant la période hivernale. Si jamais l'hiver 2007 n'amenait pas autant de sorties que d'habitude, ce dernier estime que la clientèle ne devrait pas avoir l'impression d'avoir payé pour rien son contrat de déneigement. «Vous savez, il y a des hivers où on est sorti au moins 30 fois et personne ne s'est offert pour nous payer plus pour nos dépenses en surplus», plaide-t-il.
 
C'est que plusieurs entreprises de déneigement doivent réserver les services de leurs conducteurs de souffleuses tout l'hiver, et ce, qu'il y ait ou non de la neige. S'il y a une chute de neige, il faut honorer les contrats et la machinerie doit se mettre au travail tout de suite, explique M. St-Germain de Saint-Germain et Filles. «Alors, on garantit les salaires pour que les gars restent disponibles», explique-t-il.

Du déjà vu
Dans le métier depuis 35 ans, M. St-Germain a déjà connu une situation climatique semblable. «Il y a une trentaine d'années, nous n'étions sortis que sept fois durant l'hiver dont trois fois qui n'auraient pas vraiment été nécessaires», dit-il. «Cette année-là, je me souviens qu'à Yamachiche, un cultivateur avait été photographié par Le Nouvelliste parce qu'il coupait son blé en décembre. Ça avait passé dans le journal», raconte-t-il.
 
Les archives du Nouvelliste révèlent en effet que M. Émile Villemure de Yamachiche avait récolté un champ d'avoine à l'aide d'une moissonneuse non pas en décembre, mais le 12 janvier 1980. Ce n'est pas la chaleur qui avait provoqué ce phénomène inhabituel dans le milieu agricole, toutefois, car il faisait - 6,7 degrés Celsius cette journée-là, selon Environnement Canada. C'était plutôt une question de rareté des précipitations, les champs étant libres de neige. Toutefois, le mois de décembre précédant avait connu des épisodes de réchauffement au point où des plantes bulbeuses avaient fleuri aux fêtes.
 
De toute façon, les déneigeurs interrogés s'accordent pour rappeler que l'hiver n'est pas fini et que la neige pourrait frapper au moment où l'on attendra plutôt le printemps. «On peut très bien avoir de la neige en avril»,signale M. St-Germain qui en a vu d'autres.
 
Yvan Ducharme rappelle qu'en moyenne, il tombe 250 cm de neige dans la région. Toutefois, normalement, 50 % de toutes les précipitations hivernales sont déjà tombées à la mi janvier, précise Paul Fournier. Mais le mois de mars, signale-t-il, a déjà réservé des surprises. En fait, il faudra attendre au mois d'avril pour savoir si l'hiver 2006-2007 aura été aussi anormal qu'il semble vouloir l'être.

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