Le Nouvelliste 2 septembre 2004

 

Yamachiche se divise


Il y aurait quelques riches qui auraient l'intention de vider leurs grassouillets comptes de la caisse populaire pour déposer leur argent ailleurs, au mieux à la succursale de la Banque Nationale qui a pignon sur rue Sainte-Anne depuis des lustres. Il y en a d'autres qui menacent de ne plus acquitter leur dîme. Certains ont déjà commencé à aller à la messe à Pointe-du-Lac ou à Louiseville. Et il y a ceux qui ne feront rien de tout cela, mais qui ne se cachent pas pour chialer.

C'est le cas de Jean Lord, («pas Lard» précisera-t-il), 71 ans, qui habite face à l'église où il a déjà été le bedeau pendant vingt ans. C'en est un qui ne se fait pas prier pour exprimer son désaccord sur le projet de construction d'une nouvelle caisse populaire, sur une partie du stationnement de l'église, face au cimetière... et à la statue de Sainte-Anne, qui deviendra moins visible, même si elle est déjà pas mal cachée par un tremble.

À Yamachiche-la-douce, Yamachiche-la-tranquille, Yamachiche-la-vieillissante, la population est divisée. Peut-être pas à 50-50, mais on ne peut nier qu'il s'est installé une grogne chez une partie de la population.

La caisse

La caisse populaire de Yamachiche est actuellement bien logée, dans un immeuble plus que convenable, sur la rue Notre-Dame. Mais Notre-Dame, ce n'est pas Sainte-Anne. Là, à côté de l'église, au coeur de la municipalité, tout près de deux foyers pour personnes âgées, ce serait plus stratégique, plus visible, plus accessible à une majorité. Quand on vieillit, les pas sont comptés. Alors, la caisse a offert à la fabrique 50 000$ pour une parcelle de terrain, promis d'entretenir à ses frais le reste du stationnement de l'église et d'améliorer l'éclairage.

La fabrique a sauté sur l'occasion, le curé a approuvé et l'évêché a sanctionné le tout. «C'était une occasion à ne pas rater, car elle ne se représentera peut-être pas dans l'avenir», explique Denis Côté, le président de l'Assemblée, qui chapeaute les marguilliers. «Aujourd'hui, il y a des églises qui doivent être vendues. Il y a beaucoup de fabriques qui sont confrontées à de sérieux problèmes financiers.»

Sauf que les opposants répliquent que l'église n'a justement pas de problèmes financiers. Quand on l'a reconstruite, en 1957, on a fait une répartition et l'église a été payée comptant, Aurore Bergeron, qui n'est pas contre le projet de la caisse. qui se retrouvera à deux pas de chez elle, se rappelle que son mari avait versé 5000$. «On était des cultivateurs... aujourd'hui, j'aurais pas les moyens.» 

Le curé marmonne

Denis Côte admet qu'on ne manque pas d'argent. «Mais il y a toujours des dépenses. La dîme rapporte 25 000 $ par année. Quant a la quête du dimanche... C'est sur que si le curé Jean Naud était plus souriant et surtout, s'il parlait un peu plus fort. On a beau lui avoir installé un micro et posé des hauts-parleurs, les fidèles se plaignent toujours de ne pas comprendre ce qu'il dit. D'ailleurs, c'est peut-être plus pour cela que par boycottage que certains ont déserté l'église de Sainte-Anne d'Yamachiche pour celles de Saint-Antoine-de-Padoue ou de Notre-Daine-de-la-Visitation. C'est sur que si le curé Naud, au lieu de marmonner, avait la belle façon et faisait les prêches de François Doucet, a Pointe-du-Lac, la quête dominicale rapporterait plus que 230$, et les marguilliers seraient peut-être moins inquiets pour l'avenir financier de leur église.

Mais il y a eu une assemblée en  juin et le projet de la caisse a été adopté, par scrutin secret à 122 voix contre 69. La cause est depuis entendue... même si on a fait signer entre-temps une pétition comportant plus de 500 noms s'opposant au projet.

Ne reste plus que les prières, quelles soient faites à Sainte-Anne ou à Notre-Dame-de-la-Visitation. «Le bon Dieu est plus fort que le diable», se dit Simone Ferron, qui est opposée au projet... parce qu'il lui faudra traverser la rue Sainte-Anne. Ça l'inquiète.

Même si elle la traverse déjà pour aller à la messe. Et puis, quoi qu'il arrive, elle va laisser son argent a la caisse et payer sa dîme. Car, dans son petit catéchisme. il était dit que «Droits et dîmes tu paieras à l'Église fidèlement».

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