Le
Nouvelliste 26 avril 2004
Martin Shad Ferron
Le jeune agriculteur-conteur de Yamachiche mord dans la
vie à pleines dents
Yamachiche
Roger Levasseur
(Collaborateur spécial) |
Jeune agriculteur majoritaire dans une
des deux compagnies formées avec ses
parents pour l'opération de la ferme
ancestrale, Martin Ferron, de
Yamachiche, se lève à 4h le matin pour
la traite de ses 25 vaches laitières et
les soins à son cheptel de 50 bêtes.
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Tous les matins à 4h, sauf le samedi soir. En
effet, il mène parallèlement une carrière
artistique de conteur et il travaille en plus
sur le plancher du café-spectacles La Pierre
Angulaire, à Saint-Élie-de-Caxton, le vendredi
soir, le samedi soir et le dimanche midi. Son
nom de scène est Martin Shad Ferron.
«La semaine je fais en sorte de bien dormir de
sorte que je suis capable de me payer une nuit
blanche. Le samedi soir, je quitte La Pierre
Angulaire aux petites heures. J'arrête prendre
un café à La Porte de la Mauricie et je viens
ensuite m'occuper du troupeau», a expliqué le
jeune homme de 25 ans.
Après des études secondaires au Séminaire de
Trois-Rivières. Martin Ferron a décroché un DEC
à l'Institut de technologie agroalimentaire de
Saint-Hyacinthe. «La transition pour prendre une
partie de la relève à la ferme familiale s'est
faite tout naturellement. Il n'y a pas eu de
grosses conversations arrêtées avec mon père
Denis», a-t-il enchaîné. Martin s'est impliqué
immédiatement au sein de sa profession. Il y a
deux ans, il a été honoré lors d'un gala de la
relève agricole. Il est administrateur pour son
syndicat de base de l'UPA et il est président du
comité de relève agricole pour le territoire des
syndicats de base Chavigny, Grand-Pré et des
Chutes. Lors de l'entrevue, il se préparait pour
une série de rencontres dans les écoles
secondaires où il valorisera la profession
agricole.
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PHOTO: SYLVAIN MAYER |
Côté artistique, Martin Ferron dit avoir
toujours baigné dans l'univers du monde
fantastique. Des amis
imaginaires, il en a toujours eus. «À 2 ans, je
m'intéressais aux contes de Walt Disney. J'ai
joué
à Donjons et
dragons
et j'ai dessiné toutes sortes de lutins. J'ai
fait du théâtre et de l'Impro et j'ai commencé à
m'écrire des contes. Client de la Pierre
Angulaire depuis 5 ans, je demandais à
Fred.Pellerin de me donner son opinion sur ce
que je faisais», a raconté Martin.
Le jeune conteur dit avoir eu sa première chance
en novembre 2002. «Fred n'ayant pas le temps de
voir mon travail, il me demanda plutôt de
présenter le spectacle. Lors de ces
présentations, on le fait dans le style de nos
contes», expliquera-t-il.
Martin Shad Ferron dit être différent des
conteurs qui optent pour le conte folklorique
traditionnel.
«Moi, je décroche de cette tramelà. Ça m'amuse,
mais ça ne vient pas me chercher. Les thèmes de
mes contes sont puisés dans les faits divers que
l'on voit dans les médias : l'itinérance, la
violence, la pédophilie. Je rapporte des traits
de la société. Le but premier n'est pas d'être
moralisateur mais si les gens sont portés à
réfléchir, tant mieux. Exemple, le conte où le
Bonhomme Sept Heures est un pédophile.
Aujourd'hui, je dis que ça peut être le
coach
de hockey, un chauffeur d'autobus, un oncle. Je
mentionne que ça ne me fait rien qu'une personne
soit aux hommes ou aux femmes, mais les petits
enfants, tu ne touches pas», a rapporté le jeune
homme.
Shad livre ses contes en faisant aussi de
l'animation à des hôtels de la région de
Saint-Alexis-des-Monts.
Il présentera prochainement son spectacle à la
salle Pauline-Julien de Cap-de-la-Madeleine et
il fera partie du prochain Festival de contes de
La Pierre Angulaire.
«Les contes, c'est un passe-temps. Si j'ai du
temps libre, oui, je vais faire de la scène.
Mais, la priorité est mon travail d'agriculteur.
Ça passera toujours en premier, même si je dois
refuser des contrats», est-il déterminé.
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Se méfier des apparences
Martin Ferron a des anneaux
accrochés aux sourcils, aux oreilles
et à la lèvre inférieure. «Si j'ai
adopté ce
look,
ce n'est pas pour les mêmes raisons
que les
punks.
Si mes cheveux sont longs, c'est que
je ne les coupe pas. C'est peut-être
une image de scène... Par ailleurs,
quand les gens me voient ils se
demandent ce que je peux bien
connaître en agriculture. Après une
discussion, ils s'aperçoivent que
c'est trompeur. Il ne faut pas se
fier aux apparences!», rappelle
Martin, ajoutant que les drogues ne
l'intéressent pas.
«Même pas la cigarette et quand je
travaille à La Pierre, c'est une
bière ou deux, c'est tout», fait-il
ressortir.
À l'opposé de son
look
actuel, Martin Ferron a fait partie
des Forces armées canadiennes, les
trois années de ses études
collégiales à Saint-Hyacinthe. «J'y
ai appris énormément sur les
relations humaines et sur moi en
particulier», estime-t-il
maintenant.
En définitive, Martin Ferron veut se
démarquer de l'image traditionnelle
du jeune agriculteur. «Généralement,
on voit la relève agricole comme des
jeunes qui demeurent chez leurs
parents et qui parlent de tracteurs,
le dimanche après-midi. Oui, je
demeure chez mes parents, mais je me
suis aménagé un grand
loft au sous-sol. En 2005, je
vais construire ma propre maison.
Non, je n'ai pas de petite amie. Je
me dis que ça ne presse pas et qu'il
y en aura sûrement une pour moi,
quelque part, quand le temps
viendra», at-il philosophé.
Martin Ferron a trois autres frères.
«Depuis 1999, pour la ferme
laitière, mon père s'occupe des
champs et l'étable, c'est moi. Mon
frère Patrice est dans l'autre
compagnie qui s'occupe de l'élevage
des poulets. Tant qu'à nos deux
frères cadets, ils ne semblent pas
intéressés par une carrière en
agriculture», a résumé celui qui est
également actif au sein du club
Optimistes de Yamachiche.
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«Martin s'est signalé lors du gala de la
relève
agricole. Nous sommes biens contents du
dynamisme
qu'il affiche, autant comme président de
notre comité
de relève que comme administrateur au
syndicat de
base. Prochainement, il visitera les
écoles pour livrer
un message portant sur la valorisation
de la
profession. Enfin, avec ses talents
artistiques, on
apprécie la touche personnelle qu'il
apporte lors de
nos activités sociales.»
M. Yvon Lamy,
président du syndicat de base de l'UPA,
secteur Chavigny |
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«Il y a 2 ans et demi, il nous est
arrivé, les cheveux longs et anneaux
aux sourcils. "Moi je suis conteur.
Je vous propose de travailler sur le
plancher avec, en échange, la
possibilité de présenter les
conteurs", a-t-il dit. C'était un
cadeau du ciel. Il a ainsi pris la
relève de Fred Pellerin qui était
parti. Martin Shad Ferron, c'est le
cultivateur qui tire ses vaches le
matin et qui quitte le café à 2 ou
3h du matin. Son style s'apparente à
Lafontaine, sauf que des humains
remplacent les animaux.»
- M. Sébastien Pedneault,
directeur du café-spectacles La
Pierre Angulaire, à
Saint-Élie-de-Caxton
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«Martin est un éleveur Holstein et
un
producteur laitier comme moi. Nous
avons
eu l'occasion de siéger ensemble sur
plusieurs comités. C'est un type qui
n'hésite
pas à donner son opinion et qui est
capable
de s'intégrer à un groupe. Très
sympathique,
Martin Ferron est un gars déterminé,
un
perfectionniste dans tout ce qu'il
entreprend.»
-
M. Michel Lemay,
producteur agricole à
Saint-Barnabé-Nord
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