Le Nouvelliste 13 décembre 2003

LES GENS D'ICI

Martin Ferron vise haut

 

BRIGITTE TRAHAN
Yamachiche

Le club . Holstein Saint-Maurice/ Maskinongé devrait remettre, en janvier, un trophée à un jeune éleveur laitier de 25 ans dont une des vaches aura produit, jusqu'à présent, 100 000 kilos de lait au cours de sa vie. Ce n'est pas un record, mais cette longue production est de plus en plus rare dans les troupeaux laitiers. Souvent, les vaches sont envoyées à l'abattoir après seulement quatre ans de vie, lorsque leur production commence à diminuer. Or, la vache qui vaudra une médaille à Martin, «Prune», a 14 ans.

Malgré son jeune âge, Martin Ferron d'Yamachiche a un talent certain pour l'élevage laitier mais ce qu'il y a de plus étonnant chez lui, c'est qu'il est aussi bourré de talents artistiques. Par les beaux soirs d'été, il lui arrive d'enfiler ses échasses et d'aller faire une petite marche au parc Champlain, habillé en quêteux. Du haut de ses longues jambes de bois, il arrache un sourire à tout le monde. «Des fois, il est minuit et ce sont des punks que je rencontre. À la hauteur que j'ai, ils pourraient me faire prendre une bonne jambette mais c'est tout le contraire. Ils viennent me voir et on jase»; raconte-t-il. ,

Martin Ferron est un conteur-né. Ses histoires ont du contenu et visent à faire réfléchir son auditoire sur des thèmes comme la violence et la pauvreté. C'est là son principal loisir, d'ailleurs, puisqu'il est seul à diriger son entreprise dont il détient 60 % des parts, achetées de ses parents. Son troupeau de 33 bêtes nécessite son attention tous les jours de la semaine. Mais quand la situation le permet, il lui arrive d'aller faire des spectacles à la Pierre Angulaire de Saint-Élie-de-Caxton. «Dans le temps des fêtes, j'en donne deux par semaine, en moyenne», dit-il.

À le voir raconter ses histoires ou chausser ses échasses (parfois même en chevauchant son percheron) et en apprenant qu'il a fait des études secondaires axées sur la musique, on ne croirait jamais avoir devant soi un homme d'affaires très impliqué dans son entreprise, président de la Relève agricole de la MRC de Maskinongé, administrateur de la Relève agricole de la Mauricie et administrateur du club Optimiste d'Yamachiche.

«J'ai été dans l'armée», laisse-t-il tomber pour ajouter à l'étonnement. «Après mon école secondaire, j'ai suivi des cours à Saint-Hyacinthe pour devenir éleveur. Pour payer mes études, j'étais dans la milice à temps partiel», raconte l'ex-caporal Ferron.

«J'ai aime relever le défi de porter de l'équipement lourd sur mes épaules (et même celui de certains co-équipiers qui lâchaient prise en cours d'exercice) puis de dormir dehors par les grands froids d'hiver.

J'adore relever des défis», raconte-t-il.

Le mot défi est d'ailleurs omniprésent dans tout ce qu'il entreprend. Par exemple, «pas question d'envoyer une vache à l'abattoir parce qu'elle est moins productive. Moi, je préfère de loin la remettre sur pattes si c'est une bonne bête qui a du potentiel», dit-il.

Martin Ferron

Martin Ferron

Martin Ferron

Martin Ferron
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Le nouvelliste Stéphanne Lessard

Le jeune producteur laitier Martin Ferron mène une double vie: celle d'éleveur laitier et celle d'artiste. On le voit ici sur ses échasses.

Sa Prune est un bel exemple. Très âgée, il fut un temps où l'immobilité nuisait à sa santé. Ses articulations étaient enflées et une partie de son pie ne donnait plus de lait. Pas question de s'en départir pour autant. Martin Ferron s'est mis dans la tête d'améliorer son état de santé en la faisant marcher dehors plusieurs fois par jour et lui a même fabriqué un parc où elle peut bouger à sa guise. Aujourd'hui, cette vache est sur le point de faire remporter une médaille de longue production à la Ferme Trigenes.

Pour Martin Ferron, les vaches sont ses employées qu'il appelle d'ailleurs affectueusement - quand ce n'est pas par leur nom - ses «pitonnes» ou ses «flounes».

S'il se paie le luxe de passer des soirées à donner des spectacles, Martin Ferron ne laisse jamais ses bêtes très longtemps seules. Il lui arrive de revenir de la Pierre Angulaire au beau milieu de la nuit mais il s'empresse d'aller faire sa tournée dans l'étable pour voir si tout est en ordre.

«Si je sais qu'une vache est sur le point de vêler, je ne la laisse jamais seule. Je dors dans le foin, dans l'étable, pour être là quand ça va arriver», raconte-t-il. «Elles sont ma priorité.».

Martin Ferron n'était pas destiné, au départ, à devenir éleveur. C'est son père et son cousin qui s'occupaient du troupeau avant et il avoue lui même qu'il n'y connaissait rien. «Mais un jour, quand ils ont fait des agrandissements à la ferme, j'ai été demandé pour m'en occuper et je me suis mis à aimer ça. Je ne savais pas vraiment ce que c'était avant parce que je n'étais pas impliqué. Là, ce n'était pas juste un job de petit nègre, tu sais, nettoyer, passer le balais, et autre. Je m'occupais de génétique, de régie. C'était tout autre chose.»

En 1999, la ferme familiale se divise en deux sections. Une d'elles est consacrée à l'élevage des poulets et revient à un de ses frères. Le troupeau laitier lui revient.

Martin Ferron avoue lui même que c'est dans l'étable que lui viennent souvent les meilleures idées pour les spectacles qu'il présente dans les écoles et les diverses festivités régionales. Il est à parier qu'il doit en raconter parfois de bien bonnes à ses «flounes».

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