Le Nouvelliste 26 juillet 2003

Yamachiche au passé multiculturel 

Des descendants de loyalistes et d'Acadiens dans la région

 

Josiane Gagnon

 

Malgré ses allures québécoises, la municipalité de Yamachiche cache une histoire riche en diversités linguistiques et religieuses. En effet, au 18e siècle, les Québécois «pure laine» y ont côtoyé les déportés acadiens ainsi que les loyalistes fuyant la Guerre d'indépendance américaine de 1776.

En 1755, alors qu'une guerre France-Angleterre était imminente, les dirigeants anglais entreprirent de mettre la main sur les terres fertiles de l'Acadie, dont les habitants refusaient de prêter serment à la Couronne britannique. En septembre, ils réunirent donc les Acadiens dans une église de Grand Pré et les firent prisonniers. Leurs terres et leurs propriétés furent saisies par la Couronne. Ils restèrent en captivité un mois durant sur des navires et à l'église avant d'être déportés.

Plusieurs Acadiens furent envoyés aux États-Unis. Mais la vie dans les colonies britanniques de religion protestante était plutôt pénible pour ces fervents catholiques, la langue française se dressant aussi comme une barrière à leur intégration.

À partir de 1763, ils obtinrent la permission de quitter les colonies pour e Bas-Canada. Dès lors, 192 Acadiens partirent du Massachusetts pour rejoindre Yamachiche, où se trouvaient des terre fertiles. Ils y furent très bien accueillis par la population locale, qui se montra solidaire face à la souffrance qu'avaient connue ces arrivants.

Arrivés dans leur fief d'adoption, les Acadiens s'empressèrent de se marier et de faire baptiser leurs enfants par un prêtre catholique. Chaque dimanche d'août, septembre, octobre et novembre 1763, des groupes d'enfants furent baptisés.

Les Acadiens s'établirent sur deux concessions yamachichoises, dont les rangs furent baptisés dans les circonstances Grande et Petite Acadie, où passe aujourd'hui le Chemin-des-Acadiens .

Ceux-ci s'intégrèrent très bien  à leur communauté d'adoption, le partage de la langue et de la religion catholique avec leurs hôtes y collaborant. Avec les années, ils se mixèrent avec la population locale, devenant les ancêtres des Landry, Leblanc, Tessier, Trahan, Aucoin, Melançon et Pellerin.

En 1766, le recensement indiqua 636 personnes résidaient à Yamachiche, ce qui en faisait la 2e ville la z peuplée de la région après Trois-Rivières, qui comptait pour sa part 686 âmes.


LES LOYALISTES DE PASSAGE

À la suite de la perte par la France de la guerre de Sept ans (1756-1763) contre l'Angleterre, celle-ci dû céder tous ses territoires d'Amérique du Nord, à l'exception des îles Saint-Pierre et Miquelon. Le Bas-Canada se retrouva donc sous domination anglaise, ce qui ne plut pas aux Canadiens français qui se battirent pour sauver leur langue et leur religion.

Or, un seigneur vouant une totale allégeance à l'Angleterre, le colonel Conrad Gugy, accepta d'accueillir sur sa seigneurie, en 1778, 442 loyalistes fuyant la Guerre d'indépendance américaine. Le seigneur Gugy fit construire pour eux des habitations et un moulin à scie. De plus, leurs rations alimentaires, vêtements et instruction scolaire furent à la charge du gouvernement anglais.

Cependant, les arrivants loyalistes ne s'intégrèrent pas aussi facilement que les Acadiens à la communauté yamachichoise. «À l'époque, la mentalité consistait à tout faire pour sauver la culture .canadienne-française et résister à la conquête anglaise. Comme la religion catholique et la langue française étaient vraiment très importantes pour les habitants de l'époque, les loyalistes ne furent pas très bien accueillis à Yamachiche», explique Stéphane Buisson, historien spécialisé dans l'histoire de la municipalité.

« La situation était plutôt particulière pour un petit village comme Yamachiche. Pour les loyalistes, il était beaucoup plus facile de s'intégrer aux communautés des grands centres comme Montréal et Québec où les anglophones étaient mieux. acceptés», ajoute M. Buisson.

En 1786, les loyalistes se dispersèrent, en Ontario et dans la Baie des Chaleurs, entre autres. Certains s'établirent définitivement dans la région, dont à Louiseville, Maskinongé, Plessisville et Sainte-Ursule, comme les Turner, Ross, Morrisson, Elliott, Fraser et Scalter.

Dans un cimetière se trouvant sur la route menant  de Saint-Gabriel-de-Brandon à Saint-Didace; un monument fut érigé à la mémoire des loyalistes fondateurs du lac Maskinongé. Celui-ci fut entretenu par Pierre Elliott Trudeau, ancien premier ministre du Canada, qui avait là un de ses ancêtres.

Source: J.-Alide Pellerin. Yamachiche et son histoire. Éditions du bien public, TroisRivières, 1980.

josiane.gagnon@lenouvelliste.qc.ca

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