Le Nouvelliste 3 avril 2000

Le lac Saint -Pierre, un écosystème à partager

Brigitte Trahan 
Yamachiche

Pour en assurer la pérennité, un écosystème comme celui du lac Saint-Pierre devrait être approché d'une manière écosystémique en tenant compte à parts égales de l'économie, de la société et de l'environnement, explique M. Jean Burton, conseiller scientifique au Centre Saint-Laurent d'Environnement Canada. Mais c'est loin d'être le cas, comme ont pu le constater la centaine de participants au premier colloque régional du Comité ZIP du lac Saint-Pierre qui se tenait samedi, à Yamachiche.

Le fleuve Saint-Laurent se passerait bien, de toute évidence, de l'influence d'une espèce dont il n'a pas besoin pour vivre: l'homme. Pollution agricole, rejets sanitaires et industriels, érosion des berges par la navigation, voilà quelques-uns des nombreux impacts déplorables aux quels il faudra s'arrêter.


(Alpho Presse: Alain Bédard)
De gauche à droite: Mme Jacynthe Bourgeois , coordonnatrice du comité ZIP du lac Saint-Pierre, M. Pierre Latraverse, président du comité , M. Michel Isabel, maire d'Yamachiche, municipalité 
hôtesse du colloque et Mme Louise A. Bellemare, membre du 
conseil d'administration de la ZIP et représentante de la MRC
de Maskinongé
 

Certaines données permettent de croire qu'avec les connaissances adéquates, la technologie, la volonté et la participation du milieu, il est possible de cohabiter équitablement avec notre écosystème. M. Serge Hébert, du ministère de l'Environnement faisait remarquer que des progrès ont été enregistrés tout récemment dans la qualité de l'eau du fleuve en ce qui a trait à la présence du phosphore. Ce polluant est présentement à la baisse dans presque toutes les stations d'échantillonnage et ce, depuis l'avènement des stations d'épuration des eaux usées.

Même phénomène du côté des coliformes fécaux dans les rivières Maskinongé, Du Loup, Richelieu, Saint-François, Yamaska et Nicolet. En fait, en termes de qualité de l'eau du fleuve, le tronçon de la Mauricie fait bonne figure, mais on peut dire merci, pour cela, au lac Saint-Pierre et à son filtre naturel des îles de Sorel-Berthier, faisait remarquer M. Hébert. C'est au niveau des rejets de la Communauté urbaine de Montréal que les choses se gâtent le plus. «On compte 6 000 coliformes fécaux par 100 ml d'eau à cet endroit», fait il remarquer. Or, le ministre de l'Environnement interdisait récemment à la CUM de chlorer ses rejets puis que cela occasionne la formation de sous-produits cancérigènes. Il existe toutefois un système d'épuration à partir de lampes ultraviolettes, un système qui nécessiterait un investissement de 30 millions $ à la CUM.

La pollution n'est pas le seul problème du lac Saint-Pierre. Plusieurs des îles de Sorel sont présentement menacées de disparition et plusieurs berges sont gravement affectées par la circulation maritime. Bien que des discussions soient présentement en cours entre le gouvernement et les armateurs pour tenter de limiter la vitesse des navires dans certains secteurs plus étroits, il de meure extrêmement difficile d'intervenir au niveau des plaisanciers. «On aura beau faire des règlements, fait remarquer Jean Burton.

Pourtant, il est urgent d'agir. Une étude du ministre de l'Environnement datée de 1994 rapporte que 67 % du tronçon Montréal-Sorel est affecté par les érosions. Présentement, le ministre a donné priorité à 98 segments qui seront stabilisés, «mais il est clair qu'on ne peut tout faire, faute de moyens», souligne Mme Diane Dauphin, du Service canadien de la Faune.

Jean Burton propose une approche holistique aux divers problèmes de l'écosystème fluvial. Selon lui, toutes les interventions humaines ont des répercussions, et parfois ces répercussions sont bien loin de leur point d'origine. Aussi croit-il que le début de la solution passe par l'in formation, l'implication du milieu et la technologie.

Selon lui, les décisions concernant un système aussi complexe que celui du lac Saint-Pierre et du fleuve Saint-Laurent ne devraient pas appartenir à un seul groupe mais faire intervenir plusieurs organismes représentés par des personnes intéressées et convaincues. Il estime que les usagers, c'est-à-dire la population, devraient être partie prenante du débat, à condition, précise-t-il , qu'on tienne compte de ce qu'ils ont à dire et qu'on ne fasse pas seulement les consulter. Finalement, lorsqu'une solution à un problème est introuvable, il faut investir dans la technologie. Bien entendu, précise-t-il, ceci n'est souvent possible qu'en période de prospérité économique, c'est souvent pourquoi on ne s'attaque à certains problèmes que 20 ans après leurs premières manifestations..

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