LE VÉNÉRABLE GRAND-DUC

Article de Michel Bourassa paru à l'hiver 2003-2004 dans la revue l'Ornithologique du Club d'ornithologie de Trois-Rivières

Par une belle journée de janvier, très ensoleillée et froide, je m'aventure dans le fond d'une baie gelée et surtout enneigée.  Connaissant parfaitement l'endroit, je sais que trois fossés de terres agricoles déversent leurs eaux dans la baie régulièrement durant la saison printanière.  La curiosité me pousse à emprunter la route gelée de chacun d'eux.

La première entrée est bloquée par des congères et je passe avec quelques difficultés pour enfin accéder au fossé bordé de chaque côté de plusieurs érables et autres essences d'arbres.  À part quelques Mésanges à tête noire, tout est calme.

Sans m'en rendre compte, le ciel se couvre de nuages et une neige légère, composée de gros flocons, se met à tomber et la température s'adoucit brusquement.  Arrivé au deuxième canal dont l'embouchure est dégagée, je m'y engage assez rapidement pour aussitôt diminuer la cadence et même m'arrêter complètement, car, pour une fois, c'est moi qui suis l'objet d'observation.  Un Grand-duc d'Amérique me dévisage carrément avec ses deux gros yeux jaunes et ce n'est pas n'importe lequel, croyez-moi!  Il est d'une beauté majestueuse dans son plumage gris pâle givré et d'une prestance parfaite sur une branche près du tronc d'un érable géant.  L'image du vieux et vénérable sage me vient immédiatement à l'esprit et dans ce même ordre d'idée, je respecte sa quiétude en me retirant lentement sans l'importuner davantage dans ce cadre enchanteur.  En sortant de ce petit ruisseau, j'enlève de mon itinéraire le troisième parcours et clos cette randonnée sur une excellente note avec ce joyau d'observation.