PODIUM DES RISQUES ORNITHOLOGIQUES (3)

Article de Michel Bourassa

L'Or

Le bronze et l'argent étant connus, l'or vous sera dévoilé à ce podium inusité lors des prochaines lignes et c'est encore avec des souvenirs de douleurs intenses que ça va être fait.

C'est à la fin du mois d'avril 2003 et par un soleil de tous les instants, je circule assez rapidement sur la voie de service, en parallèle à l'autoroute 40 et ce, pour me rendre au dernier chalet d'été, situé dans les derniers mètres de cette route, aux limites de Yamachiche et près du lac St-Pierre; j'ai l'intention de découvrir, si possible, la présence de Macreuses brunes, observées l'an dernier à cet endroit tranquille.

Tout en pédalant et jetant un coup d'œil, "à gauche et à droite", dans le ciel et écoutant le moindre chant d'oiseaux, j'entends et je vois un véhicule 4 X 4 en me tournant la tête vers l'arrière, lequel semble se ranger vers la gauche et ce, en toute vitesse (souvent les véhicules agissent ainsi afin de me donner de l'espace, même si je frôle le bord du chemin).  Je poursuis normalement ma route et dans la seconde suivante, un vacarme s'effectue tout derrière moi, soit les roues du camion qui entrent dans la gravelle de l'accotement et instinctivement, je mets les freins du vélo, croyant me faire tuer, puisque je suis persuadé que les roues gauches sont dans la partie gravelée et que le véhicule est directement dans mon dos.

Cette réaction instantanée (freins avant et arrière) avec cette bicyclette aux freins rapides, car c'est seulement la deuxième journée d'utilisation, donne comme résultat (avec la vitesse assez véloce) de me faire "passer" au-dessus des guidons et de me projeter durement sur l'asphalte, sur le bras gauche, avec les deux mains, encore sur le vélo, la casquette conservée sur la tête ainsi que les jumelles, demeurant au cou mais m'ayant frappé au front.  N'ayant pas remarqué l'entrée d'un chemin de terre menant aux résidences d'été, les roues avant du camion ont touché à la "descente" gravelée au lieu des roues de gauche.

Ledit camion, la conductrice à son bord, recule derrière moi pour me porter secours, ainsi que l'auto qui suit, se garant à son côté:  un ami, dans les alentours, ayant vu le tout, lui aussi se stationne en triple, sur la voie pour voir arriver un quatrième individu s'immobiliser presque en quadruple, bloquant complètement la voie de service et ce, pour un simple accident de vélo.

Toujours couché sur l'asphalte et avec le bras gauche engourdi mais de plus en plus douloureux dû à la pression sanguine qui se manifeste suite au choc violent, lequel choc a soudé trois des doigts de ma main gauche à la poignée, je suis obligé d'enlever avec l'autre et très délicatement, chacun de ces doigts tout en voyant le poignet enfler en un temps record.

Mon ami veut demander une ambulance mais je refuse, après m'être libéré de la bicyclette et surtout, vérifié chacun des os du bras gauche en les pressant assez puissamment, malgré les vives douleurs.  Après m'être relevé et ensuite, regardé l'état du vélo, lequel a le guidon gauche courbé et la roulette droite pour le changement des vitesses, fendue, je décide de me rendre à la destination prévue tout en remerciant, avant mon départ, ceux qui m'ont secouru.  À peine un kilomètre parcouru que déjà la douleur devient trop intense et je dois revenir sur ma route tout en conduisant d'une main.  Je m'arrête plutôt au chemin de la "pointe Yamachiche" pour décompresser et pour tenter de faire passer le mal au bras en le massant continuellement.

Heureusement, l'observation de quelques spécimens, au lac St-Pierre, me soulage quelque peu mais j'ai quand même eu très peur pensant, pendant une fraction de seconde, voir venir la fin de ma vie sans pouvoir être capable de réagir.  Le bras gauche, sûrement quelque peu fracturé, a fait mal pendant au moins neuf mois, ayant même des élancements occasionnels dans celui-ci pendant cinq autres; pour m'en souvenir, je vais m'en souvenir car mon corps l'a dans sa mémoire organique.  Cette médaille d'or de risques aurait pu être la dernière, ce qui aurait été dommage, sachant les excellents moments vécus par la suite, jusqu'à aujourd'hui.