UN TEMPS DE VIRÉO
Article de Michel Bourassa
Dans l’avant-midi du 15 mai 2010, je suis à la recherche
des parulines dans mon « petit
royaume » de la Petite rivière Yamachiche,
mais le pessimisme m’accompagne en ce jour, car le temps est gris et les
vents font des siennes avec leurs continuelles rafales, deux des
éléments naturelles jouant en ma défaveur pour la
présence de ces petits oiseaux colorés; c’est seulement par
habitude que je me retrouve en ces lieux à ce moment.
Après quelques minutes d’une disette de parulines
intéressantes, ayant seulement la Paruline
jaune dans l’environnement immédiat, des sons mélodieux se
font entendre du fond de la « petite baie » et ce,
émanant de la cime des érables géants du petit
boisé, dont ceux de plusieurs Viréos
mélodieux; malgré la vélocité de la force
éolienne, je reconnais quelques chants de parulines
et je me mets à la tache, car la hauteur, le vent, les feuilles et
surtout le ciel grisâtre, sont autant d’obstacles à
surmonter afin de bien identifier chaque oiseau. Le premier à collaborer
est une magnifique Paruline à gorge
orangée, se posant sur une branche d’un érable à
l’agonie avec ses feuilles affaiblies; à son tour, une Paruline obscure se présente, suivie d’une Paruline noire et blanche, laquelle est plus basse sur un
tronc d’un autre érable, à proximité. La chance
continue à me sourire avec l’arrivée d’une Paruline à collier et d’une Paruline à poitrine baie, cette dernière
vêtue de ses plus beaux atours; je suis déjà satisfait
d’avoir pu recenser ces différentes espèces dans des
conditions aussi difficiles, mais le meilleur est à venir, comme
l’on dit communément.
Toujours dans le même secteur, me déplaçant à
peine de quelques mètres en-dessous des arbres de cette petite
érablière, les branches au zénith de ces géants
voient leurs feuilles sans cesse se faire malmener par les rafales et sur
l’une de celles-ci, où la végétation a oublié
de pousser pour une quelconque raison, deux oiseaux s’y trouvent et un Viréo de Philadelphie semble effectuer une danse de
son cru, accompagné de très près par un autre possible viréo, pas encore connu, dû au temps sombre,
en particulier; continuellement aux trousses du Viréo
de Philadelphie, le passereau se
fait sommer par le viréo jaunâtre de
cesser immédiatement le harcèlement par une attaque convaincante
de ses ailes battantes et redressées vers l’avant, prêtes
à la confrontation, si nécessaire : le tout se termine par
la retraite du supposé viréo, à
l’apparence grisâtre.
Alors, providentiellement, cet intrigant petit « paquet de
plumes » vole vers un des arbres de ma position pour s’y poser
à une hauteur raisonnable, pouvant me permettre de placer enfin un nom
sur lui; à la première impression, c’est un Viréo à tête bleue, mais tel
n’est pas le cas puisqu’il est presque complètement gris
en-dessous. Avec la tête du Viréo
à tête bleue, les possibilités sont limitées dans
les espèces de cette catégorie, mais je sais que c’est un viréo. Rendu à la maison, j’identifie
ce fameux spécimen en consultant mon guide des oiseaux et le Viréo
plombé sort enfin de l’anonymat, devenant une primeur à
vie : sensations très fortes lors de cette identification
exceptionnelle!