DEUX PICS POUR UN CŒUR
Article de Michel Bourassa
En ce matin du 7 avril 2010, je remonte la toile du salon comme à
l’habitude et ce, afin de pointer mes jumelles en main vers les
mangeoires du voisin de l’autre côté de la rue. En levant
les loupes, je remarque un Pic flamboyant mâle qui sautille sur
l’asphalte et qui s’amène vers ma pelouse jaunie, mais il ne
s’y rendra pas car il continue sur le bitume et s’enligne sur un
autre mâle de son espèce, lequel, un peu moins costaud, est
prêt à lui faire face : la confrontation devient
inévitable.
Ces deux as de pics, en période de préparation pour la
nidification, sont des plus fringants pour conquérir le cœur de
leur dame et ils le prouvent en paradant avec la queue ouverte dans des
déplacements circulaires sautillés tout en ne se quittant pas des
yeux; ce cérémonial s’accompagne de quelques tentatives, de
part et d’autre, de coups de bec ratés au corps, alternés
avec des attaques non réussies de la poitrine destinées à
celle de l’adversaire. Le plus frêle des pics commence à
reculer, se sentant moins assuré dans le combat, et l’erreur est
déjà commise car le plus imposant lui saute sur le dos en le
piquant à plusieurs reprises derrière la tête pour
immédiatement le renverser sur le gravier de la rue tout en lui
assénant quelques autres coups de bec dissuasifs au ventre; ces dernières
actions agressives suffisent à faire capituler le
désemparé Pic flamboyant avant que celui-ci perde la carte et
demeure sur le carreau, n’étant tout simplement pas de taille.
Probablement déjà établi dans un des arbres de mon
terrain, le Pic flamboyant vainqueur pourra dorénavant aller rejoindre
l’élue de son cœur, cette dernière ayant
peut-être été témoin de cette brave défense
de territoire, lui donnant totalement raison de l’avoir choisi comme partenaire,
devenu le roi des lieux. Cette scène valait réellement la peine d’être
vue.