LE GLAÇON LUMINEUX

Dame nature possède une beauté incomparable et lorsque l’on s’intéresse à elle, cette dernière accepte volontiers de livrer quelques-uns de ses secrets, surtout si le respect est de mise à son endroit lors d’un rendez-vous privilégié en sa compagnie, laquelle est toujours appréciée avec son calme naturel.

En hiver, vêtue de son manteau blanc hermine, malgré son accueil parfois glacial (lequel fait souvent rougir), à l’occasion, elle montre un visage totalement insoupçonné par une réaction coordonnée de certains éléments composant son caractère spécifique à l’annuelle période de la froidure. Une de ces manifestations hivernales que la belle nature conquérante a bien voulu me présenter s’est produite à la fin de l’après-midi du 25 février 2009 et ce, à l’heure du soleil couchant.

En ce jour, lors de sa descente, cet astre diurne envoie sa lumière vive sur l’agrandissement de ma demeure et mes yeux, éblouis par cette clarté reflétant sur celui-ci, repèrent deux glaçons, au coin de sa toiture de tôle : rien pour écrire à sa mère, comme l’on dit communément. Mais, en y regardant de plus près avec mes jumelles, je découvre un caprice de cette imprévisible nature sur la plus petite des deux transparentes carottes d’eau glacée; en effet, sous l’action des derniers reflets du soleil, la partie arrière de ce glaçon, à l’apparence de cristal, s’illumine de petits jets multicolores de lumière, passant du jaune à l’orangé, pour continuer dans du rouge tout en voyant, à l’occasion, apparaître du bleu et du vert, selon la position du soleil ou selon mes moindres déplacements.

Le spectacle d’une simplicité désarmante en vaut la chandelle avec ce phénomène qui m’était inconnu jusqu’à aujourd’hui, d’autant plus que l’eau qui descend sur le glaçon devient une valeur ajoutée en se permettant de mélanger les différentes couleurs sur son passage. Cette eau est le résultat direct de la fonte de la neige sur la toiture, laquelle eau doit obligatoirement se laisser glisser vers cette bougie de glace annelée translucide, ce, pour continuer sa route en gouttelettes à son extrémité et la terminer au sol enneigé.

À partir des derniers instants de la présence de l’astre du jour à l’horizon, les rayons de celui-ci ne sont plus efficaces et le glaçon reprend son apparence habituelle, soit une blancheur à tendance à peine bleutée et il perd instantanément la magie des dernières minutes; mais, j’ai pleinement profité de ces sublimes moments d’envoûtement et je suis déjà assuré que ça va revenir très bientôt, peut-être même dès demain.

Ce peut-être dès demain deviendra une réalité, mais il me faudra attendre l’après-midi du 21 janvier 2010, un moment remplissant les yeux de merveilles lumineuses sorties de la magie du soleil, lequel, de son ciel familier, agit en maître incontesté avec ses nombreux tours de passe-passe. En effet, en regardant les glaçons d’une toiture protégeant des tables à pique-nique, lesquels glaçons dépassent la trentaine, tous suspendus à la file indienne, dans leur frêle texture respective, tels des prismes, ils projettent, chacun dans leur différence, toutes les couleurs de l’arc-en-ciel et ce, à l’infini.

Pendant un bon cinq minutes, d’innombrables coloris apparaissent et dansent simultanément, en harmonie, sur chacune des unités d’eau glacée, ce qui fascine et rend presque incroyable toute cette démonstration de beauté lumineuse, à l’apparence d’anges, de fées et de lutins aux teintes scintillantes se transformant continuellement au moindre déplacement de l’astre et de l’humble être que je suis dans l’univers terrestre. Ce paradis de couleurs enchanteresses aux multiples visages dépasse même les plus ingénieux feux d’artifice, tellement l’originalité est présente mais, à regret, je dois partir, n’étant pas prêt de revoir de sitôt une telle situation, surtout dans un concentré des plus sensationnels : à couper le souffle!