DES POULAMONS À YAMACHICHE!

 

 

    Ce n’est pas un poisson d’avril, car nous sommes le 21 décembre; ce serait plutôt des «poissons de Noël», communément appelés ainsi par les gens de Sainte-Anne de la Pérade, au début des années 1950.

 

    Pendant une période d’environ dix ans, soit du milieu des années 1950 jusqu’au milieu des années 1960, quelques pêcheurs commerciaux d'Yamachiche pêchaient sous la glace de la Petite rivière Yamachiche, à son embouchure, de la fin décembre jusqu’à mi-janvier, afin de pouvoir être dans la possibilité de nourrir convenablement leur famille. Après leur saison de pêche normale estivale, se terminant à la fin de novembre pour plusieurs, quelques-uns reprenaient le collier et installaient quatre ou cinq filets de pêche sous la glace, un travail très exigeant, combiné très souvent à des conditions climatiques extrêmement rigoureuses comme le froid, la neige et la poudrerie, sans oublier, parfois, des dégels imprévus, compliquant la tâche encore plus. À cette époque, ces pêcheurs ne possédaient aucun autre revenu, car l’assurance-chômage n’existait pas encore.

 

    En capturant de la barbotte, de la lotte et quelques autres espèces de poisson, ils se sont rendus compte que des quantités assez appréciables de poulamons entraient eux aussi dans les nasses, à leur grand bonheur, car ça devenait un revenu supplémentaire par la vente à domicile, à leurs client habituels et à quelques épiceries, également. Sans être des volumes comparables à ceux reçus par la rivière de Sainte-Anne de la Pérade, ces pêcheurs sortaient suffisamment de «petits poissons des chenaux» des eaux pour les aider financièrement à se rendre jusqu’au printemps, soit jusqu’au début d’avril.

 

    Cette pêche au poulamon, avec des filets sous la glace, a cessé au milieu des années 1960 lorsque le gouvernement fédéral a accordé le droit aux pêcheurs commerciaux du lac Saint-Pierre (à ce moment, agissant individuellement, n’étant pas encore regroupés en association) d’obtenir des prestations d’assurance-chômage (ainsi appelé); ce droit a été obtenu grâce aux pressions constantes des pêcheurs auprès de leur député progressiste­conservateur Rémi Paul (Berthier-Maskinongé-De Lanaudière), lequel a réussi à faire valoir cette requête en signalant la similitude de ce métier avec celui des pêcheurs commerciaux de la région de la Gaspésie.

 

    Les «petits poissons des chenaux» ont graduellement disparu de la région d'Yamachiche dans les mêmes années du creusage de la voie maritime (après 1960) et l’apparition de l’île aux sternes, à Baie-Jolie, site choisi pour déposer la terre et le sable retirés de ce chenal. Les conséquences directes ou indirectes de la présence de cette île, laquelle s’avançait et s’avance toujours vers le large, furent de bloquer le passage aux poulamons (poissons un peu paresseux), lesquels ont changé leurs habitudes pour, depuis ce temps, demeurer toujours plus à l’est, soit à Trois-rivières, à Batiscan et surtout, à Sainte-Anne de la Pérade.

 

    Une autre espèce de poisson a probablement agi de la même façon dans les années 1960 et c’est le Bar rayé, lequel est aujourd’hui complètement disparu du lac Saint-Pierre.