RAMASSEUR DE POCHES DE JUTE
Très peu de gens
connaissent le métier d’antan qui consistait à la cueillette des poches de jute
vides ayant contenu diverses moulées et de poches de coton vides ayant contenu
de la farine ou du sucre; certains sacs de farine étaient fleuries.
Jusque dans les années
1960, le «ramasseur» de poches parcourait les fermes de tous les rangs de
Yamachiche ainsi que des municipalités limitrophes (Louiseville,
Pointe-du-Lac, St- Thomas-de-Caxton, St-Sévère,
St-Léon et St-Barnabé) et cet itinéraire suffisait amplement à fournir le
volume nécessaire de cette marchandise très lucrative. Un des plus connus ayant
effectué ce travail particulier fut M. Réal Buisson, de la rue St-Joseph de
notre localité et ce dernier, très coloré et aimé de tous, recevait toujours un
accueil très chaleureux chez chacun de ses fournisseurs; en effet, il était reçu
régulièrement avec des biscuits et un breuvage et les conversations
s’éternisaient avec le fermier, avant la transaction de sacs de jute et/ou de
coton (au grand dam de son fils qui l’accompagnait).
Directement de l’entrepôt
de »Réal», les principaux acheteurs de ces poches de jute provenaient de la
communauté juive de Montréal et les paiements s’effectuaient en argent dès la
réception des nombreuses piles de sacs; ces fréquentes transactions, complétées
à domicile, réussissaient à faire vivre honorablement cette famille. En plus,
avec les poches de coton uni, lesquelles avaient une valeur beaucoup moindre,
et avec les poches de coton fleuries, lesquelles obtenaient la faveur des mères
de famille ( surtout ) pour la confection de robes et de jupes pour les jeunes
filles, ça devenait un surplus financier apprécié.
Les pêcheurs commerciaux
et les chasseurs de grenouilles comptaient parmi les clients de M. Réal Buisson
et lorsque ceux-ci acceptaient d’acheter quelques poches légèrement trouées,
une réduction leur était accordée, ce qui faisait l’affaire des deux partis.
L’arrivée des poches de plastique a mis un terme à ce genre de commerce. Il
faut ajouter que M. Joseph Milette et M. Édouard Adam (tous deux de Yamachiche)
ont aussi œuvré dans ce domaine et qu’une quantité appréciable de sacs de jute
étaient vendues aux meuneries locales, ce qui bouclait la boucle, comme on dit
familièrement; pour les poches percées, chaque commerçant les recousait lui-même à la machine à coudre,
ce qui devenait déjà, à cette époque, du recyclage.
En somme, ce métier
inusité mérite à être souligné afin de ne pas oublier la débrouillardise des
gens, avant 1970.