L’ÉBLOUISSEMENT

 

Au retour, par la rivière, après la fin de ma récolte de poissons au lac St-Pierre, je décide d’explorer un secteur le long de celle-ci, où je découvre assez régulièrement des parulines, des viréos et des roitelets en cette période de la journée, en septembre, soit vers l’heure de midi; nous sommes le 21 septembre 1993. Donc, après environ trois cents mètres, j’accoste mon embarcation à la rive, je l’attache à un arbre et je grimpe d’un pas lent les quatre marches artisanales en terre pour rejoindre le lieu convoité.

En montant, je sais déjà qu’il y a une activité prononcée des oiseaux par les chants et les gazouillements entendus, mais en me présentant au sommet de la côte, je deviens  totalement aveuglé par le soleil, pour n’apercevoir dans les secondes suivantes que des ombres, lesquelles voltigent d’une branche à l’autre; je me tasse quelque peu vers un des plus gros arbres, afin de cacher cette lumière intolérable et aussi, pour retrouver ma vision. Enfin, dans mes 7X35, je repère mes premières parulines, surtout des Parulines à croupion jaune, et un autre éblouissement me frappe, pas le soleil cette fois, mais un oiseau dont j’avais appris  la présence dans la région de Joliette , l’année précédente, soit la Paruline à gorge jaune; elle est à peine à trois mètres sur une branche morte et me fait face, quelques secondes seulement, pour s’envoler plus haut dans le feuillage, où je perds le contact visuel dû aux rayons trop puissants de l’astre diurne. Peu importe, cette brève visite de la Paruline à gorge jaune , observation rarissime, m’a encore plus ébloui que le soleil.

 

 

 

 

                                                                 LE ROI

 

Par une froide matinée d’automne, très lentement, je serpente la rivière, dû à la fine couche de glace à la surface, très coupante et dévastatrice pour les flancs d’une barque si on roule assez rapidement, l’expérience ayant déjà été faite. Donc, j’arrive enfin à la sortie du lieu navigable, où le canal débute et même si le soleil me frappe en plein visage, j’entrevois une tête très colorée au-dessus d’un corps noir et blanc; grâce à la glace qui m’a obligé à réduire la vitesse du moteur et m’a permis une arrivée en douceur, ce canard ( je suppose ) solitaire n’a pas encore remarqué ma présence et je peux espérer l’observer, ce qui se fait avec mes jumelles et je réussis, malgré la vive lumière, à mettre un nom sur ce canard, qui en est bien un, car c’est un magnifique  mâle Eider à tête grise, lequel patauge près de la glace , dans le courant du ruisseau.

Ce moment de splendeur dure à peine cinq secondes, car l’impressionnant eider s’envole et s’éloigne vers les eaux du lac, au large, probablement dérangé par les reflets des rayons du soleil, dans les globes oculaires des jumelles. Je suis quand même ravi de ce cadeau inattendu qui a été offert à mes yeux en ce jour frisquet.