Un cri du coeur des riverains de Yamachiche
L'entraide et la
solidarité animent les citoyens de l'endroit. France Bellemare
donne un coup de pouce à ses voisins qui repartent vers leur
résidence.
Stéphane Lessard
Paule Vermot-Desroches
(Yamachiche) La chaloupe doit faire des zig-zag entre les
branches et les piquets du chemin pour ne pas accrocher le
fond de l'eau ou se cogner contre des arbres morts qui ont
été amenés par le fleuve. Sur ce qui est normalement un
chemin résidentiel, on voit flotter des débris à la tonne.
Ici, un module de jeux pour enfants. Là-bas, un réservoir
d'huile à chauffage. Un peu plus loin, un poulailler
complètement détruit. Les poules? Il y a longtemps qu'elles
se sont noyées.
France
Bellemare
Stéphane Lessard
«C'est la désolation», résume
Jean-François Blais, dont la résidence est complètement
entourée d'eau et le garage inondé depuis plusieurs jours.
Cette désolation, elle se constate à chaque mètre parcouru
autour des résidences qui, bien qu'elles soient construites
en zone inondable et conçues en conséquence, n'ont jamais
connu un aussi gros coup d'eau en près de 20 ans.
Quelques mètres plus loin, Claude Buisson
embarque lui aussi dans son canot pour retourner vers sa
maison. L'homme qui tente de garder le moral a subi un dur
coup par cette crue printanière. Sa chienne, fidèle
compagne, s'est noyée dans cette inondation. «Je suis allée
la chercher dans l'eau, elle avait du sang dans la bouche.
Je ne sais pas si elle a tenté de manger quelque chose
qu'elle n'aurait pas dû, mais elle a été blessée et s'est
noyée», raconte-t-il.
L'eau dans ce secteur de Yamachiche a atteint des
niveaux jamais vus en 20 ans.
Stéphane Lessard
À cela s'ajoute la très grande
frustration, encore palpable, de ces vagues de plus de six
pieds qui ont frappé les maisons il y a maintenant plus
d'une semaine, et qui auraient été causées par un bateau
circulant trop vite, laissant derrière elles des dizaines de
milliers de dollars de dégâts. Galeries arrachées, escaliers
endommagés, murets détruits et mobilier emporté ne sont que
quelques dommages constatés par les résidents, qui
continuent de recenser des bris à tous les jours. Difficile
de savoir si une enquête a été déclenchée à Ottawa, mais les
résidents constatent que depuis leur sortie publique à ce
sujet, la vitesse des navires a passablement ralenti sur le
fleuve.
N'empêche, même à très basse vitesse, les
navires laissent derrière eux des vagues de un à deux pieds
qui viennent secouer la chaloupe dans laquelle nous prenons
place. France Bellemare, une résidente de l'endroit, saute
de la chaloupe pour aller récupérer la toile de l'abri du
véhicule, qui a été emportée par les vagues quelques minutes
auparavant. Son mari, Pierre Savich, accoste la chaloupe
contre la galerie de la maison, dont le vide sanitaire est
complètement inondé. Si le fleuve devait monter de quelques
pouces encore, c'est dans la maison que l'eau se
retrouverait. La météo des prochains jours n'a rien pour
rassurer ce couple, qui s'affairait vendredi à placarder la
galerie pour au moins empêcher les vagues de venir taper
dans les fenêtres et la porte patio.
Pierre Savich s'affairait, vendredi, à barricader la
galerie de sa maison pour éviter que les vagues ne se
rendent jusqu'aux fenêtres et fracassent les vitres.
Stéphane Lessard
«S'il fallait qu'une vague vienne se
briser ici, ça fracasserait les fenêtres. Ça c'est certain»,
note Pierre Savich, ajoutant que tout près de 22 cordes de
bois de chauffage sont parties à la dérive dans les derniers
jours.
Tout le muret de pierre construit pour
protéger la maison de la montée des eaux a été emporté.
D'immenses blocs de béton ont aussi été déplacés par la
force de l'eau. «Quand viendra le temps de reconstruire tout
ça, ça va prendre bien plus que deux ou trois personnes. Il
va falloir de la machinerie», constate Mme Bellemare.
Aide
C'est maintenant un vibrant appel à l'aide
que lancent les résidents de l'endroit. «Nous avons besoin
d'aide maintenant et nous aurons besoin d'aide quand cette
eau-là sera partie. Il y aura un énorme ménage à faire et
tout le monde, nous avons besoin d'aide, c'est clair», a
clamé Jean-François Blais, au nom de ses voisins. Ce dernier
précise que les gens savent qu'ils sont en zone inondable,
mais que la crue printanière 2017 n'a rien des inondations
habituelles, et que les résidents ont également été victimes
du comportement d'au moins un navire.
Déjà, plusieurs se mobilisent et tentent
d'organiser l'aide pour tenir de grandes corvées de
nettoyage dès que l'eau se sera retirée, mais M. Blais
revendique aussi une mobilisation plus grande pour venir à
bout de cette situation exceptionnelle.
Des tonnes
de débris flottent à la surface de l'eau, dont des
réservoirs d'huile de chauffage et même des modules de
jeux pour enfants.
Stéphane Lessard
«Je crois à la mobilisation. Celle de la
municipalité, la nôtre, celle des citoyens. J'ai besoin que
la Municipalité vienne nous voir jusqu'à nos maisons et non
pas d'arrêter les services au chemin. Quand on va arriver au
moment où on va devoir nettoyer, ça va prendre des bras»,
constate-t-il. Appelé à se prononcer sur l'utilité d'une
intervention de l'armée, tel que soulevé par Thomas Mulcair
vendredi matin, Jean-François Blais se montre totalement
ouvert. «On va prendre l'aide de toutes sortes. L'aide
financière, l'aide morale, l'aide de ceux qui voudront
fournir des bras. Peu importe, on va avoir besoin d'aide»,
résume-t-il.
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