Le Nouvelliste 20 juin 2007
La mère rage
contre le système de justice
La mère d'Alexandra Guimond, Pauline Laverrière.
Photo: Stéphane Lessard |
Claude Savary
Trois-Rivières
C'est une mère complètement démolie qui a
quitté hier matin le bureau des procureurs des poursuites pénales et
criminelles de Trois-Rivières. Me Jacques Blais, le directeur par
intérim du bureau, venait de lui annoncer qu'il n'y aurait aucune
accusation portée contre le conducteur qui a blessé mortellement sa
fille de 15 ans, le 6 octobre 2006, sur le chemin Grande-Rivière Sud
à Yamachiche.
L'expert de la police qui a étudié la scène de
l'accident n'a pu conclure que le conducteur avait conduit son
véhicule de façon dangereuse. En analysant les traces de freinage,
on a déduit que le véhicule roulait à 91 km/h dans une zone dont la
vitesse est limitée à 80 km/h.
Un drôle de message
Pauline Laverrière, la mère d'Alexandra Guimond (la jeune victime) a
déclaré que cette décision lançait un drôle de message aux jeunes
conducteurs. "Faites les fous, conduisez à haute vitesse, tuez
quelqu'un, c'est pas grave, on ne va pas vous poursuivre",
déplorait-elle en ajoutant qu'un jeune lui avait d'ailleurs déjà dit
"...si j'en tu un, c'est pas grave, je n'irai pas en prison."
Cette mère n'oubliera jamais la scène qu'elle a vu ce soir du 6
octobre. Quelques minutes avant l'accident, Alexandra l'avait
appelée pour lui dire de ne pas s'inquiéter, qu'elle était sur le
point d'arriver. Les minutes passaient mais sa fille n'était
toujours pas là. Elle décide d'aller voir sur la route. Le pire
scénario qu'elle pouvait imaginer venait de se produire. Sa fille
gisait au sol sur le bord de la route. Des gens arrivés
immédiatement après l'accident avaient pris soin de lui dégager la
tête qui s'était prise dans le pare-brise.
Selon Mme Laverrière, les ambulanciers ont mis un temps fou pour
arriver sur les lieux. Selon elle, ils s'étaient trompés de chemin.
Les blessures de la jeune fille étaient telles qu'elle n'a pas
survécu. Dans les mois qui ont suivi, Mme Laverrière et d'autres
citoyens ont demandé au conseil municipal d'abaisser la vitesse de
80 à 70km/h mais sans succès.
Hier, cependant, c'est contre la justice qu'elle pestait. Selon ses
propos, si ç'avait été l'enfant ou un parent d'un policier, la
poursuite aurait déposé des accusations mais "pour du monde
ordinaire comme nous", on juge que ça ne vaut pas la peine. Elle est
d'autant plus choquée que les passagers de deux véhicules qui
auraient été dépassés par le jeune conducteur auraient affirmé que
ce dernier roulait à une vitesse folle. On lui aurait par ailleurs
dit que le Code de sécurité routière et le Code criminel étaient
deux choses distinctes et que les éléments de preuve au dossier ne
permettaient pas de porter des accusations.
Appelé à expliquer sa décision, Me Jacques Blais n'a pas souhaité
parler aux journalistes.
claude.savary@lenouvelliste.qc.ca
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