Johanne
Delorme acquittée
Le juge n'a pu
être convaincu hors de tout doute qu'elle était ivre
lors de l'accident qui a causé la mort de son fils
Claude Savary
Trois-Rivières
Johanne Delorme, une mère de 32 ans qui a
été impliquée dans un accident routier le 19 mars 2004 sur la
route menant de Charette à Yamachiche, accident qui a causé la
mort de son fils de 4 ans, a finalement pu bénéficier du doute
raisonnable. Elle a été acquittée des accusations de conduite
d'un véhicule avec les facultés affaiblies causant la mort et
des lésions corporelles et de conduite avec un taux supérieur
d'alcool à la limite permise.
Cet acquittement a eu l'effet d'une bombe chez la
famille du père du garçon décédé et ex-conjoint de
Johanne Delorme.
Le grand-père du bambin, Claude Goyette, a
littéralement explosé dans les corridors du palais de
justice en criant à tout rompre son désespoir. Il a même
passé sa colère en frappant les murs tellement il ne
comprenait pas la décision du juge Gilles Bergeron.
"Je suis découragé de la justice, je suis très, très
désappointé", a-t-il dit avant d'éclater en sanglots.
Puis, il a sorti de ses poches une petite photo montrant
son petit-fils Maxime et la fille de son ex-compagne,
Kim (qui prenait aussi place dans le véhicule lors de
l'accident mais qui n'a subi que des blessures
mineures).A l'instar de l'arrière-grand-mère, Rita
Gendreau, il a dit que c'était un amour d'enfant, un
petit être qu'ils chérissaient très fort.
Le juge Bergeron a fait le tour de la preuve soumise par
la procureure de la Couronne, Me Joanne Tourville, et
plus particulièrement les témoignages des experts, pour
conclure qu'il y avait place à un doute raisonnable.
Lors du procès, plusieurs éléments ne rendaient pas la
cause très sympathique. Ainsi, après avoir été chercher
son fils Maxime dans une garderie de l'Assomption, vers
16 h le jour de l'accident, Johanne Delorme s'est
dirigée vers Charette pour aller chercher ses deux
filles. En cours de route, elle s'est arrêtée dans un
dépanneur pour acheter une bouteille de 200 millilitres
de vin rouge. Elle boit toute la bouteille sur place et
reprend sa route. |
Le grand-père du bambin décédé, Claude Goyette tient une
photo de son petit-fils Maxime en compagnie d'une des
filles de l'accusée.
Photo: Sylvain Mayer |
Arrivée à Charette, elle prend une bière chez le père de
ses deux filles. Elle y reste près d'une heure avant de
quitter vers 18 h 55. Elle s'arrête dans une petite
épicerie de Charette et y achète deux bouteilles de
bière. |
PHOTO: SYLVAIN MAYER
Johanne Delorme a quitté rapidement le palais de
justice de Trois-Rivières une fois prononcé le verdict
d'acquittement. |
Elle reprend aussitôt le volant. Alors qu'elle roule
vers Yamachiche, elle s'ouvre une bouteille de bière et
la consomme entièrement en cinq minutes à peine. Elle
jette ensuite la bouteille vide par la fenêtre. Sa fille
Kim réclame par ailleurs son attention pour lui montrer
quelque chose. Johanne Delorme détourne un instant son
attention de la route. Elle se retrouve sur l'accotement
puis en tentant de ramener le véhicule sur la voie, elle
provoque une embardée. Son fils Maxime est éjecté avec
son siège d'enfant et est retrouvé face contre terre
dans un champ. Bien que la mort ne sera officialisée que
plus tard, l'enfant ne respire déjà plus. Johanne
Delorme, prise de panique, demande à sa fille d'aller
chercher de l'aide dans une maison des environs. Elle va
de son côté chercher son fils et le ramène dans ses bras
afin d'attendre les secours. «Mon dieu, il est mort, je
l'ai tué...» dira-t-elle.
À leur arrivée sur les lieux de
l'accident, les policiers s'interrogent à savoir s'ils
doivent faire passer un test de dépistage d'alcool à la
conductrice qui dégage une odeur d'alcool. Comme elle
doit être conduite à l'hôpital, on lui fera un
prélèvement sanguin en milieu de soirée. L'analyse de
cet échantillon donnera un résultat de 119 milligrammes
d'alcool par 100 millilitres de sang. Témoin expert pour
la Couronne, le chimiste Jacques Tremblay a étudié
différentes hypothèses pour déterminer finalement que le
taux le plus bas que l'accusée pouvait avoir au moment
de l'accident était de 104. De son côté, le chimiste
Jean-Jacques Rousseau qui témoignait pour la défense a
conclu que Johanne Delorme présentait assurément un taux
d'alcool inférieur à la limite permise selon le scénario
de consommation donné par l'accusée. Entre les deux
versions, le juge Bergeron n'a pu tirer une conclusion
définitive de telle sorte qu'il a fait bénéficier
l'accusée du doute raisonnable. Même chose quant à
l'hypothèse que Johanne Delorme avait les facultés
affaiblies au moment de l'accident. |
Comme l'avait plaidé la procureure de
l'accusée, Me Maryse Brouillette, le juge Bergeron a trouvé
plausible l'explication selon laquelle une distraction a causé
la sortie de route et l'accident et pas nécessairement
l'affaiblissement des facultés par l'alcool.. |