Gardienne du temps à Yamachiche
La maison Nérée-Beauchemin restaurée avec amour
CATHERINE BILODEAU
Yamachiche
Sur la rue Sainte-Anne, à Yamachiche, se dressent en un
alignement cramoisi une vingtaine de maisons de brique rouge aux
caractéristiques architecturales typiques de la ville. Cet
assortiment d'immeubles unique témoigne de la présence de
briqueries qui existaient autrefois dans les environs. «Le
matériau était là, le savoir-faire s'est développé», révèle à
cet effet Marie-Berthe Guibault, propriétaire de l'une de ces
demeures aux allures d'une autre époque.
Inspirées du style néo-classique datant du XIXe siècle, ces
sentinelles richement ornementées, oeuvres de deux frères
architectes originaires de l'endroit, Joseph et Georges-Félix
Héroux, paraissent conserver jalousement l'âme du village tant
par leur uniformité que par leur étonnante préservation.
Cette sauvegarde, on la doit en majeure
partie à ces individus qui, au fil des années, s'en sont
portés acquéreurs avec la conviction profonde qu'il
valait la peine de les mettre en valeur. C'est avec
cette volonté que Mme Guibault est devenue l'heureuse
propriétaire de la maison Nérée-Beauchemin, en 1995.
«C'est un privilège de vivre dans une telle maison, mais
il faut avoir le goût de ça», estime-t-elle,consciente
de la responsabilité qui lui incombe désormais
Restauration d'un rêve
Si l'aspect historique de la maison Nérée-Beauchemin a
en grande partie motivé le choix de Marie-Berthe
Guibault lors de l'achat de sa demeure, il s'est surtout
agit d'un coup de coeur à l'endroit du poète né à
Yamachiche: «Au début des années 70, il y a eu des
journées portes ouvertes de la maison auxquelles je me
suis rendue. Je me demandais: qui est ce personnage de
Charles-Nérée Beauchemin? Lors de la visite, j'ai pensé
que ce serait une chance d'y habiter». Un rêve qu'elle a
pu concrétiser quelque 20 ans plus tard, lorsque la
maison a été mise en vente.
Suite à l'acquisition de cette construction érigée en
1867 et classée monument historique en 1978, Mme
Guibault et son conjoint, Alain Denis, ont poursuivi les
travaux de rénovation et de restauration déjà bien
entamés par le propriétaire précédent. «L'ancien
propriétaire l'avait repris à zéro. Il avait déjà fait
refaire les ouvertures, le chauffage, l'électricité, la
plomberie», relate-t-elle.
La première étape fut donc, pour eux, le remplacement
du mortier des fondations. «C'était le mortier
d'origine. Il commençait à se désintégrer», se rappelle
Mme Guibault. La magnifique clôture blanche ceinturant
l'habitation, véritable dentelle, a elle aussi eu droit
à une cure de jouvence.
«La clôture, c'est le coup d'éclat de la maison»,
expose la propriétaire. Elle l'a ainsi fait reconstruire
par un artisan d'après les techniques de fabrication
traditionnelles, en bois d'acajou, qui a la propriété de
repousser l'eau. |
PHOTO: STÉPHANELESSARD
Alain Denis et Marie-Berthe Guibault sont les heureux
propriétaires de la maison Nérée-Beauchemin sise à
l'angle des rues Sainte-Anne et Nérée-Beauchemin, à
Yamachiche. La demeure, construite en 1867 et classée
monument historique en 1978, se distingue notamment par
les magnifiques volets encadrant ses fenêtres de même
que par sa clôture blanche, véritable bordure de
dentelle. |
«Pour ne plus jamais avoir à y retoucher»,
mentionne celle qui s'est ensuite attaquée à l'aménagement
paysager puis au système de chauffage du premier étage. «Avant,
il y avait un plafond radian. Maintenant, c'est sous le plancher
du premier que l'eau chaude court», explique Mme Guibault.
Un mouvement irréversible
En ce qui a trait à l'intérieur de la résidence, Marie-Berthe
Guibault insiste sur le respect de son caractère historique.
«Tous les meubles ont l'âge de la maison», cite-t-elle en
exemple. C'est ainsi qu'à raison d'une pièce par année environ,
elle et son conjoint ont récuré, décapé, repeint, remplacé,
meublé leur nouveau chez-soi. «J'ai toujours eu beaucoup de
satisfaction à conserver cette maison et à lui redonner l'âme,
l'esprit qu'elle avait autrefois», évoque la dame avec passion.
Cette dernière a pourtant pris la décision de
mettre la maison Nérée-Beauchemin en vente. «J'ai acheté une
autre maison en 1998, dans Lanaudière, ma région natale. Ici, je
suis trop loin de ma famille», confie celle qui espère demeurer
dans son logis d'Yamachiche encore quelques années. «Tant que je
n'aurai pas rencontré quelqu'un qui en prendra soin comme moi»,
confie-t-elle. Mme Guibault ne s'en fait pas outre mesure: «Trop
de chemin a été fait. Le mouvement est irréversible».
C'est avec la voix comblée de ceux qui ont
concrétisé leurs rêves qu'elle conclut: «J'en profite du mieux
que je peux pendant que je suis dedans. Après, ce seront de
beaux souvenirs».
C'est à une reconstitution d'un salon d'autrefois
que le visiteur se trouve confronté lorsqu'il
pénètre dans cette pièce du rez-de-chaussée. Meublée
avec goût dans un style seyant parfaitement à
l'esprit originel de la maison, elle rappelle cette
époque pas si lointaine où l'on conviait les invités
à «passer au salon». |
PHOTO: STÉPHANE LESSARD
«Tire la chevillette et la bobinette
cherra», voilà l'invitation que
paraît lancer cette clochette
d'autrefois située au-dessus de la
porte principale et qui laisse entendre son «ding-dong»
à la condition que l'on actionne sa chaînette. Pour
ce faire, il suffit
d'appuyer sur l'authentique bouton de sonnette de
l'entrée. |
PHOTO: STÉPHANE LESSARD |
Les pièces de ferronnerie ont
toutes été restaurées par Mme
Guibault et son conjoint. De cette
façon, elles ont préservé
tout leur cachet. |
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