Le Nouvelliste 16 décembre 2002
La Ville de Yamachiche a signé une offre d'achat du bâtiment pour 1 $
L'ex-foyer Ernest-Jacob sauvé in extremis
RICHARD BIRON
La saga du foyer Ernest-Jacob vient de connaître un autre
rebondissement: l'ancien établissement d'hébergement pour personnes âgées ne
sera pas démoli. La municipalité de Yamachiche a en effet signé jeudi dernier
une offre formelle d'achat du bâtiment.
Si la transaction ne se bute pas à des
embûches administratives, la Ville acquerra l'immeuble pour 1 $ du Centre de
santé de la MRC de Maskinongé (CSMM) et Québec lui versera en plus une
subvention de 70 000 $ qui servira à donner une nouvelle vocation à l'édifice.
La nouvelle, qui sera officiellement annoncée en conférence de presse ce matin,
tient du coup de théâtre. C'est que le processus de démantèlement était bien
enclenché. "C'était sérieux: un architecte avait le contrat de préparer le devis
de démolition et le courant allait être coupé. Un échantillonnage avait aussi
été effectué pour voir si le sol était contaminé et un autre, pour s'assurer que
les murs ne contiennent pas d'amiante", mentionne le maire de Yamachiche, Michel
Isabelle.
Rappelons qu'en octobre dernier, un appel d'offres avait été lancé afin de
mettre l'immeuble en vente. Une seule soumission avait finalement été reçue. Les
Habitations populaires du Québec proposaient d'acheter le bâtiment pour 1 $ et
de le transformer en partie en logements sociaux.
Mais, le 22 novembre, le CSMM avait annoncé qu'il ne pouvait considérer la
soumission de l'organisme à but non lucratif, étant donné qu'elle était
conditionnelle à l'obtention de subventions du programme Accès-logis du
gouvernement du Québec. La décision de raser l'immeuble avait alors été annoncée
et elle semblait définitive.
Toutefois, le maire Isabelle n'avait pas encore lancé la serviette. Au fil de
discussions avec le député de Maskinongé, Rémy Désilets, et le gouvernement, il
a gagné la partie. "Nous avons eu deux batailles. La première, pour garder le
foyer ouvert, nous l'avons perdue. Mais la seconde, pour ne pas que l'édifice
soit démoli, nous l'avons gagnée. Ce n'était pas facile de renverser la vapeur",
indique le premier magistrat.
Selon Rémy Désilets, Québec avait toujours
souhaité qu'un projet mobilisateur puisse sauver l'immeuble de la démolition,
mais l'intérêt démontré n'avait jamais débouché sur des gestes officiels. "Le
ministère de la Santé et des Services sociaux ne voulait plus continuer à
dépenser pour administrer et chauffer le bâtiment. François Legault nous avait
donné jusqu'à vendredi dernier pour signer une offre de vente devant notaire,
sinon l'immeuble allait être démoli", explique le député.
En paraphant jeudi un tel document, la Ville a aussi obtenu du gouvernement
qu'il lui verse les 70 000 $ qu'il aurait de toute façon dû débourser pour faire
démolir l'ancien établissement d'hébergement pour personnes âgées. En plus,
Québec s'est engagé à assumer l'hypothèque de 535 000 $ qui grève toujours le
bâtiment.
Selon le maire Isabelle, c'est d'ailleurs cette charge qui avait incité
Yamachiche à refuser le projet de centre communautaire pour aînés qui lui avait
été présenté en 2000 par Rémy Désilets. "À l'époque, on ne nous donnait aucune
garantie que l'hypothèque serait levée. En plus, notre deuil n'était pas encore
fait: on ne croyait même pas que le foyer finirait par fermer", souligne Michel
Isabelle.
L'acte de vente devrait être signé devant notaire au plus tard le 1er mars
prochain. "Il reste des autorisations à aller chercher au ministère de la Santé
et au conseil du Trésor, mais on nous a dit que c'était des formalités. Ça prend
un arrêté ministériel pour conclure la transaction", ajoute Michel Isabelle.
Le représentant de la circonscription de Maskinongé à l'Assemblée nationale,
lui, hésite à parler de "formalités". "J'ai eu l'appui de François Legault et de
Joseph Facal (le président du conseil du Trésor), précise Rémy Désilets. Le
politique est d'accord, mais il reste à travailler avec les fonctionnaires pour
justifier la transaction au conseil du Trésor dans les délais convenus."
VOCATION ENCORE INDÉTERMINÉE
Le maire de Yamachiche explique que rien n'est encore décidé en ce qui a
trait à la vocation que prendra l'immeuble. Quant au projet mis de l'avant par
Les Habitations populaires du Québec, le premier magistrat ne sait pas encore
s'il se réalisera finalement. "Ces gens sont des experts qui pourraient
certainement être de bons collaborateurs", croit Michel Isabelle.
"Probablement que l'immeuble aura une vocation multiple", annonce par ailleurs
le maire, soulignant qu'un retour des personnes âgées dans l'édifice n'est pas
impossible. Dans ce cas, il s'agirait évidemment d'un projet privé, indépendant
du ministère de la Santé et des Services sociaux.
USAGE LIMITÉ?
Au moment de la vente de l'édifice au gouvernement par la Fabrique
Sainte-Anne, dans les années 70, le clergé avait souhaité que le bâtiment
conserve une vocation d'aide aux personnes âgées. C'est ainsi que, dans l'acte
de vente de l'époque, une clause de limitation d'usage spécifiait que le
bâtiment devait continuer d'être utilisé à de telles fins. "Cette clause sera
dans le nouveau contrat", indique Rémy Désilets.
Une telle modalité d'achat n'effraie pas Michel Isabelle. "Nous avons eu
l'assurance verbale que si la municipalité présente un projet structurant, ce ne
sera pas un problème pour la fabrique", laisse-t-il entendre.
______________________________________