Le Nouvelliste 22 janvier
2002
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Un curépas comme les autres
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Jean-Noël Montour n'était pas un curé comme les
autres. Quand j'ai appris sa mort, dimanche matin, je n'ai pu m'empêcher de
faire un retour dans le temps pour me rémémorer de savoureux moment, que j'ai
vécus aux côtés de ce grand passionné de la vie... et du
base-ball!
C'est le jour de mes fiancailles, il y a de ça un ou deux siècles, que j'ai réalisé jusqu'à quel point ce prêtre était différent. Après avoir célébré la messe et béni les alliances, il s'était fait un plaisir de venir bouffer au restaurant avec la famille et les amis. Instinctivement, je m'étais dirigé vers lui pour le remercier d'avoir officialisé notre amour aux yeux du grand boss de l'Au-delà.
C'est quand je suis arrivé devant lui que je me suis aperçu qu'il était bien loin de l'image que je me faisais d'un curé depuis ma tendre enfance. Cigarette aux lèvres et bière à la main, il m'a accueilli simplement, avec un bonjour attentionné. Je n'ai même pas eu à le remercier. Son large sourire, transparent d'un immense bonheur d'être parmi nous, a fait tout le travail. Les civilités d'usage ainsi faites, on a pu passer aux choses sérieuses...
Vous l'aurez deviné, la discussion a rapidement
bifurqué vers le baseball Jean-Noël Montour était un véritable mordu de
baseball. Pas des Expos, ni de Ken Griffey. Sa passion à lui, c'était le
baseball rural. Il fallait voir ses yeux briller lorsqu'il se pointait le nez à
Saint-Paulin pour assister à un bon match de baseball rural. La casquette de
travers sur la tête, il respirait le bonheur.
Au milieu des années '90, avec le déclin de la CBRM en Mauricie, il a eu la
folle idée de faire renaître de ses cendres le baseball rural. Sa vison était
simple: il voulait faire revivre ces dimanches après-midi d'antan ou les âmes
d'une municipalité avaient comme religion de venir encourager leur équipe de
baseball local. Pour l'aider à réaliser son rêve il contacta des gars qui
avaient connu cette époque frénétique du baseball rural. Le, René Truner, Yvan
Lemay, André Labé, Luc Damphousse, Denis Lemire et cie.
Je le vois encore assis dans les bureaux du Nouvelliste les bras dans les airs, m'expliquant qu'une municipalité sans sport était une municipalité qui mourrait à petits feux. Qu'une collectivité avait besoin de se rassembler derrière un club de baseball pour faire grandir son sentiment d'appartenance. Il s'avait vendre sa salade, ce bon vieux curé Montour.
Je vais vous avouer quelque chose. Même si je trouvais l'idée excellente, je ne croyais pas que son projet allait être viable à long terme. La CBRM venait de pousser son dernier soupir et je me demandais comment une autre ligue rurale pouvait raviver cette défunte ferveur du baseball en milieu rural. Mais je m'étais trompé. En ramenant le principe de la participation en haut de la liste des priorités (et en réduisant aussi les coûts d'admission pour les joueurs), les instigateurs de la LBRM ont gagné leur pari. En 1996, il y avait trois équipes. L'été prochain, 13 formations se disputeront les honneurs. Une belle réussite... signée Jean-Noël Montour!
La région a perdu un grand homme samedi dernier.
Jean-Noël Montour était peut-être un curé différent, mais la pureté presque
naïve de ses convictions lui a permis de concrétiser le plus fou des rêves:
celui de faire revivre le baseball rural en Mauricie. Une belle leçon à retenir.
J'espère que les dirigeants de la LBRM vont trouver un moyen de perpértuer la
mémoire du curé Montour. Une division porte déjà son nom, mais une autre petite
attention serait la bienvenue. Là-dessus, je fais confiance au président Luc
Damphousse. Il va sûrement trouver quelque chose.
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