Le Nouvelliste 15 septembre 2001

Les déboires de l'agriculture 
encouragent la culture biologique

BRIGITTE TRAHAN

Maladie de la vache folle, fièvre aphteuse, organismes modifiés génétiquement, pollution des cours d'eau par les pesticides, autant de choses qui ne sont pas de nature à encourager la confiance des consommateurs en l'agriculture conventionnelle moderne. «Tout cela favorise te bio», estime M. André Blanchette, directeur de la production à la Fromagerie l'Ancêtre de Bécancour.

Les producteurs biologiques ne ratent pas d'occasions de mettre ces événements en relief pour faire valoir sur quelle branche ils se perchent et sur cette branche-là, évidemment, les pesticides, antibiotiques, hormones de croissance et OMG ne sont pas les bienvenus.


Le Nouvelliste Alain Bédard
M. Pierre Gaudet, producteur de fourrages biologique d'Aston-Jonction et président de la Fédération des producteurs biologiques du Québec.

«Les gens sont apeurés par ces histoires et ça crée de la clientèle du Côté du bio», fait valoir M. Jean-Pierre Clavet, prix Phénix de l'environnement et propriétaire de la ferme bio Le Crépuscule d'Yamachiche.

À ce titre, les bios prennent leur mission très, très au sérieux. M. Pierre Gaudet, producteur de fourrages d'Aston-Jonction et président de la Fédération des producteurs biologiques du Québec explique que dans la chaîne bio, tout, absolument tout doit-être biologique, même les batteuses à foin, c'est-à-dire que même les instruments qui servent à manipuler les produits de la terre, la viande ou le lait biologiques ne doivent absolument pas servir à manipuler des produits issus de l'agriculture conventionnelle.

Dans ce style d'agriculture, tout est bio, à commencer par les graines. Pas question d'enrober celles-ci de fongicides comme dans l'agriculture conventionnel car on estime qu'un tel produit détruit la flore bactérienne nécessaire aux minéraux entre les plantes et le sol.

Plusieurs entreprises biologiques ont donc commencé à produire leurs propres semences, notamment la ferme du Grand-Portage, à Saint-Didace près de Louiseville où Yves Gagnon, un enseignant réputé en agronomie biologique, devenu semencier bio l'an dernier.


Le Nouvelliste Alain Bédard
Les poules biologiques de Jean-Pierre Clavet ont le loisir d'aller dehors ce que les poules de l'industrie ne font plus.  

Être bio n'est pas une tâche de tout repos. Lorsqu'un agriculteur conventionnel arrose son champ d'herbicides, les produits se trouvent inévitablement à déborder dans le champ de celui qui est bio, ne serait-ce que sous l'effet du vent. les végétaux ainsi «contaminés» représentent une perte car ils ne répondent pas aux critères de certification.

M.Gaudet est bien placé pour en parler. Son voisin a récemment fait la culture d'une variété de céréales modifiées génétiquement lorsque M. Gaudet a fait analyser sa propre récolte de soja, il s'est rendu compte qu'elle avait été contaminée aux OMG dans une proportion de 4%. «Ça m'a coûté 26 000$. Je n'ai pu vendre ma récolte comme étant un produit bio», raconte-t-il. «La compagnie qui vend les OMG a dit que ça ne se pouvait pas, évidemment»

Le 3 septembre, la Fédération d'agriculture biologique du Québec s'est affiliée à l'union des producteur agricoles du Québec. M. Gaudet se réjouit de cette nouvelle tribune puisqu'il a l'intention de demander à l'UPA de prendre position contre les OGM dès la prochaine assemblée générale et de faire du Québec une terre libre d'OGM.

Les gens qui consomment du bio sont préoccupés par l'emploi des pesticides et des OGM. Ils s'inquiètent aussi de la façon dont les animaux sont traités et nourris dans l'agriculture conventionnelle. Des poussins jetés vivants dans  un broyeur parce qu'ils ne sont tout simplement pas du bon sexe pour l'industrie est une situation qu'on ne trouvera pas dans le domaine bio.

D'ailleurs, les clients du bio se préoccupent beaucoup du sort des animaux. «Nos clients nous écrivent pour
savoir si les vaches qui nous donnent le lait bio sont libres. Nos consommateurs sont très sensibles à l'environnement» fait valoir M. Blanchette.

À la ferme 1e Crépuscule, les poules bios de Jean-Pierre Clavet vont dehors, ce que les poules de l'industrie n'ont plus le loisir de faire.

Ce dernier estime que le plaisir joue  sur la santé de leur système immunitaire. M. Clavet n'emploie jamais d'antibiotiques et si une poule est malade, il la soigne avec de l'argile, ce qui donne les résultats attendus, dit-il.

Pour certains clients, le bio est littéralement une cause à défendre et leur façon de militer, c'est d'y investir de l'argent et même du temps.

La ferme le Crépuscule d'Yamachiche a récemment créé une compagnie dont les clients sont actionnaires. Certains ont payés jusqu'à 25 000 $ pour s'assurer que le travail de production de viande biologique amorcé par Jean-Pierre Clavet puisse continuer.

Le Crépuscule fait maintenant partie du réseau Équiterre, un organisme sans but lucratif fondé en 1995 dont le but est d'apporter le soutien de la communauté à l'agriculture biologique.

Dans la région, la ferme Campanipol de Sainte-Geneviève-de-Batiscan  fait aussi partie de ce réseau. Les clients achètent  directement de la ferme des paniers de fruits et légumes biologiques qui sont distribués en un point de chute chaque semaine.

En général, le contenu du panier est une surprise et contient ce que la terre aura donné cette semaine-là. «je sais que les gens de Campanipol réussissent quand même, en général, à individualiser chaque panier au goût du client .~ Mais normalement, dans le réseau, le contenu du panier est une surprises», fait valoir Mine Barbara Vogt d'Équiterre.

Les clients du réseau Équiterre, dans certains cas, vont même jusqu'à fournir un coup de main à la ferme bio dont ils sont clients. «C'est plus qu'une relation commerciale. C'est aussi une relation sociale», fait valoir Mme  Vogt.

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