Le Nouvelliste 28 juillet 2001

NAUFRAGÉE PENDANT 7 HEURES

Lise Proulx échappe à la noyade

 

MICHEL CLOUTIER 
Yamachiche

Lise Proulx tient à la vie. Contre vents et marées. Naufragée durant sept heures, la Trifluvienne de 44 ans allait survivre, échappant, jeudi, à une noyade certaine dans les eaux du lac Saint-Pierre. Grâce à sont sang-froid, sa détermination et sa grande forme physique.

Sa passion de la voile allait donc basculer dans l'horreur. En effet, dans ce qui devait être une joyeuse balade en solitaire sur son léger voilier depuis les rives d'Yamachiche, Lise Proulx allait vivre les pires moments de sa vie.

Vers 14 h. elle se laisse d'abord porter par un temps radieux. «Le vent était toutefois nord-ouest. Faire face à ce vent reste toujours quelque peu risqué», a-t-elle expliqué hier, en entrevue.

Voilà qu'une heure trente plus tard. le vent du large tourne en bourrasques et renverse son  bateau. "Ouf! Je me suis subitement retrouvée à l'eau!» La Ttifluvienne ne panique guère, reste calme. habituée à ce genre de situation. Dans les bases de plein air qu'elle fréquente en famille. «il est si amusant parfois de chavirer, d'it-elle. D'autant plus que je n'étais pas très loin de la rive du lac, à mille pieds environ».

Puis elle remonte sans peine sur son voilier Peu de temps après, le gouvernail fait des siennes se détache bêtement «Comment vais-je réussir a naviguer jusqu'à la rive. J ai fini par le remettre en place au même moment je me rends compte que ma voile vient de céder un peu, elle est moins tendue » Ça augure mal.

Devant le risque paru grandissant, Lise Proulx décide de regagner aussitôt où les vents sud-ouest sont plus propices aux voiliers. «Avec un bris d'équipement ou pas. ces vents vous pousse vers la rive nord, du côté d'Yamachiche.»explique-t-elle.

DÉRIVE PÉRILLEUSE


Elle se croit sauvée, ne pense qu'à rentre au quai comme si de rien n'était. Mais le moment se gâte sa voile cède complètement. Le vent devient impétueux, l'entraîne vers le large. C'est la dérive périlleuse vers le chenal qu'utilise le trafic maritime avec ses cargos parfois énormes.

Dévié par les courants, le voilier ne se maîtrise plus. Désemparé, il est emporté dans la trajectoire du chenal. Il fait encore jour. Lise Proulx s'énerve pour la première fois. La panique s'ensuit. Elle se met à crier, donne des coups de sifflets courts et prolongés avec son sifflet de marine. Fait des signaux vers des embarcations qu'elle voit au loin. Des yachts et des voiliers. Peine perdue. Personne ne répond, on semble ignorer sa présence. «J'étais la plus seule au monde. La nuit allait s'abattre sur moi.»

«Je levais et baissais les bras, j'étais en détresse... Vraiment. La peur de ma vie. Je pensais que c'était la fin. Et je me suis mise à prier. À prier beaucoup. Très fort.»

Droit devant, elle aperçoit deux cargos de marchandises qui s'amènent. Ils sont gigantesques à ses yeux. Le courant prend de la force. Elle craint d'être aspirée. Mais pas question de mourir noyée. «Jamais», jure-t-elle. «Et je voulais en même temps sauver mon bateau. Non, c'est ma vie qui est plus importante.» C'est alors qu'elle saute à l'eau munie d'une veste de sauvetage.

 Nageant désespérément, la naufragée évite les deux cargos dont l'un vient de frôler son voilier qui se renverse. «J'y suis finalement restée sept heures dans l'eau. Mais je n' avais pas toujours conscience du temps. J'ai commencé sentir le froid. J'ai vu le bateau de la garde côtière, je me suis dit, bon ça y est, ils viennent me chercher. Mais les vagues étaient trop hautes, on ne pouvait pas me voir.»

Aucun signe à l'horizon. En nageant sans répit vers les rives de Nicolet, la Trifluvienne résistait, ne s'épuisait pas totalement, gardait sa forme. «J'étais peu essoufflée. Heureusement, j'ai un bon rythme cardiaque. La natation ça aide, je nageais à tous les jours à six heures du matin à la piscine du cégep.»

À la nuit tombée, c'est le noir complet. La rescapée atteint la grève, doit patauger à l'aveuglette dans des marrécages remplis de joncs, les jambes éraflées. Tantôt elle nage, tantôt elle marche. «J'avais très mal. Les joncs étaient très denses, dur à tasser pour me frayer un chemin.»

Elle parvient à gagner un champ, à  le traverser pour atteindre le portique d'une maison hospitalière. Il est minuit. Le cauchemar de la rescapée prend fin. 

Abasourdis en lui ouvrant la porte les occupants Hélène et Michel Rousseau de Nicolet s'empressent de la réchauffer, lui servant une soupe, un bouillon de poulet et un sandwich aux tomates. «Ils m'ont même fait prendre une douche. J'ai vraiment été choyer. Ils méritent ma reconnaissance», tient-elle à signaler.

Très sportive, cette préposée à l'admission et aux dossiers médicaux en radiologie au pavillon Sainte-Marie Centre hospitalier régional de Trois-Rivières est convaincue que sa grande forme physique et mentale l'ont sauvée d'une noyade certaine. Mère de trois enfants, elle pratique à tous les jours patin à roues alignées, le vélo, de même que le ski de randonnée en hiver.

En signalant qu'elle était saine sauve aux autorités de la Sûreté Québec, anxieusement à sa recherche Mme Proulx est rentrée chez elle avait cette pensée: la vie ne tient qu'à un fil. «En revoyant mes trois enfants et Robert, mon conjoint, j'ai compris conbien la vie est fragile et précieuse! Nous nous aimons tellement!».

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