Le Nouvelliste 21 novembre 2000

Alcool et négligence pointés du doigt

Le coroner dépose son rapport de l'accident impliquant le
motocycliste René Lemay et un tracteur agricole à Yamachiche

Patrick Chauvette
Trois-Rivières

La présence d'un taux d'alcoolémie trois fois supérieur à la norme de même que la négligence en matière de visibilité routière seraient à l'origine de l'accident qui a fauché la vie au motocycliste René Lemay sur la route 138 à la hauteur de Yamachiche.

Tels sont les propos qui ressortent du rapport déposé par le coroner Pierre Martin, chargé du dossier, qui conclut à une mort accidentelle concernant cet événement survenu vers 21 h 30 le 30 avril 1999.

Rappelons que René Lemay, alors âgé de 34 ans et originaire de Yamachiche, circulait en compagnie de trois autres amis, également aux guidons de motocyclettes, en direction est sur la route 138 lorsqu'il est entré de plein fouet dans un tracteur qui tirait un planteur à maïs. Le quatuor revenait tout juste d'une soirée passée au bar La terrasse du Loup de Louiseville lorsqu'il circulait sur ce chemin rural en direction de Pointe-du-Lac. Selon les amis de la victime, René Lemay n'aurait consommé que trois petites bières pendant leur présence au bar.

René Lemay serait décédé sur le coup. Transporté aussitôt au Centre hospitalier régional de Trois-Rivières, un examen externe a permis de démontrer que M. Lemay fut victime de polytraumatismes importants tels de nombreuses fractures du crâne, de multiples fractures de côtes et de la section complète du sternum.

Lors de l'autopsie, des prélèvements sanguins ont également permis de démontrer une alcoolémie au moment du décès qui était de 241 mg/dl, soit trois fois le seuil légal permis par la loi (80 mg/dl).

«L'affaiblissement des facultés de M. Lemay permet de croire que de son point de vue, il n'a jamais réalisé ce qui se passait devant lui et qu'il a heurté le planteur de maïs sans jamais avoir tenté ni de freiner ni de l'éviter», conclut le coroner.

Ce dernier note également de la négligence de la part du conducteur du chariot agricole, Yves Lord, qui terminait ce soir-là son travail d'ensemencement sur une terre située non loin de là.

Ainsi, l'analyste en enquêtes de collision à la Sûreté du Québec, l'agent Michel Hotte, a signalé l'absence de réflecteurs rouges sur le planteur de maïs de M. Lord. Qui plus est, l'analyse du panneau avertisseur triangulaire qui était présent sur ce même équipement agricole a démontré qu'il avait perdu ses propriétés réfléchissantes et qu'il ne permettait pas à l'ensemble routier d'être perceptible sur une distance de 180 mètres tel que prescrit par la loi.

Le coroner s'interroge aussi sur les déclarations de M. Lord mentionnant qu'il n'avait jamais vu aucune lumière de véhicule en provenance de l'ouest de la 138 au moment de s'y engager. Selon le rapport de l'agent Hotte, la visibilité ce soir-là permettait de voir un véhicule en provenance de l'ouest jusqu'à une distance de 1200 mètres alors que l'estimation de l'agent Hotte plaçait les motocyclistes à une distance de 224 mètres de l'impact.

«L'analyse faite par l'agent Hotte m'a convaincu que M. Lord ne s'est tout simplement pas assuré que la voie était libre avant de s'y engager. En s'engageant sur une route permettant une circulation rapide de 90 km/h sans s'assurer préalablement que la voie soit libre, en y circulant à une vitesse lente estimée à 20 km/h, et ce, en introduisant sur la route un ensemble routier non perceptible selon les normes de sécurité routière en vigueur, M. Lord a réuni les conditions nécessaires à la survenue d'une catastrophe. Et catastrophe il y eut! », relate le coroner Martin.

En plus de recommander à la Société de l'assurance automobile du Québec (SAAQ) de poursuivre ses efforts de sensibilisation en matière d'alcool au volant, le coroner Martin suggère de baisser le seuil légal d'alcoolémie permis à la conduite d'une motocyclette et de sensibiliser davantage les agriculteurs à l'importance d'assurer leur visibilité sur les routes du Québec..

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