Rêves magiques d'oiseaux (D)

Article de Michel Bourassa

 

La main de l'oiseau

Le destin nous favorise à l'occasion et une de ces faveurs peut survenir pendant que le corps se repose, soit dans les ténèbres des premières heures de la journée lorsque les yeux sont fermés.  J'ai eu le bonheur de voir mon cerveau être l'heureux élu afin de recevoir, en cadeau, un songe fantastique traitant du monde aviaire, mon univers de tous les instants.

Mon inconscient reçoit comme premières images, un chemin de campagne, longé par une rivière aux abords peu peuplés d'arbres.

Cette route conduit immédiatement à un solage de maison, déjà envahi par l'herbe des champs, supposant que l'été est au moins à ses débuts; il n'y a pas que l'ivraie qui occupe cette base de ciment car quatre jeunes gens, vélos à leur côté, sont assis à l'extrémité droite de ce banc d'occasion et aussi, six Moineaux domestiques (souvent présents dans mes songes), accompagnés d'un Bruant à face noire, se délassent vigoureusement à l'extrémité gauche sur l'allée bétonnée.  Ces individus et ces oiseaux sont séparés par un important espace libre sur le solage en son centre.

Soudain, des observateurs et des photographes d'oiseaux m'entourent et se précipitent vers le Bruant à face noire, pour mieux l'admirer, en bousculant même les personnes, pourtant en toute tranquillité et se sustentant (comme les êtres de la gent ailée, d'ailleurs).  Cette scène est subito presto remplacée par la disparition du centre libre et des ornithologues amateurs tout en réunissant les gens et les oiseaux, à peine à un mètre les uns des autres, laissant comme impression qu'ils n'ont pas conscience de leur proximité respective et qu'ils sont dans des lieux différents.

La scène suivante survient de l'autre côté de la rivière, à l'horizon et sous un ciel clair, dans lequel le soleil trône en roi par son éclatante présence; de ce panorama, sort un rapace, teinté de gris, s'avançant lentement mais allègrement et ressemblant à un Busard St-Martin (mâle), mais lorsqu'il arrive, parallèle au cours d'eau et me dépassant à l'autre versant, je remarque les lignes grises au ventre et à la poitrine, tellement caractéristiques du Faucon gerfaut (de forme grise) pour voir ce dernier changer la direction de son vol, revenir vers moi dans une descente vers l'élément liquide au repos, replier son ample aile gauche comme un bras et se servir de son extrémité comme une main, la plonger à la surface et en retirer quelques gouttes d'eau pour la porter à son bec, dans un geste d'une élégance inégalée tout en disparaissant presque immédiatement, ayant tout de même eu le temps de me jeter un coup d'œil de complicité.

Au réveil, j'ai réellement encore plus apprécié ces instants très courts mais très apaisants, de passage dans ma tête durant la nuit et je les ai couchés à jamais sur le papier, du moins, pour le reste de mes années de vie.