SAUVER SA PEAU!

 

                                                             

                                                         Article de Michel Bourassa

 

Le 15 septembre 2012, un ami photographe m’amène à Montmagny afin de retracer un oiseau de rivage qu’il convoite, soit le Bécasseau à échasses. Dès notre arrivée, nous commençons les recherches et pas de Bécasseau à échasses, mais il est encore très tôt et nous avons espoir de le voir, car il a été vu à chacun des cinq derniers jours; des Grands Chevaliers, des Petits Chevaliers et quelques Bécasseaux semipalmés cherchent leur nourriture dans la vase, près de l’eau, avec des Canards colverts, des Canards d’Amérique et des Sarcelles à ailes bleues qui pataugent sur l’onde, à proximité d’eux.

 

        La chute côtoyant la rue, entre le quai et le fond de la baie, voit ses eaux venir mourir à ses pieds, parmi les roches encastrées dans la surface pierrée recouverte d’une couche plus ou moins épaisse de boue; ce panorama est bucolique, avec l’ambiance créée par le bruit incessant de l’eau tombant de la chute. Dans les minutes qui suivent, une Oie cendrée domestique est aperçue, se reposant dans l’environnement de ce décor enchanteur, tout en voyant quelques Mouettes de Bonaparte venir circuler au-dessus de la chute et retourner dans la baie, en virevoltant dans toutes les directions; quelques Cormorans à aigrettes se font sécher sur les pierres du haut de la chute, profitant amplement de la présence du soleil.

 

       Au loin, un Faucon pèlerin semble s’avancer vers nous, soit le quai, et en quelques secondes, il est déjà sur place et immédiatement, il se choisit une cible comme possible repas, soit une Mouette de Bonaparte, semblant moins rapide que les autres de son espèce. La première tentative de capture du faucon, lequel semble inexpérimenté encore, est ratée, car la mouette zigzague dans tous les sens et le rapace passe tout droit; mais ce dernier rebrousse rapidement chemin et reprend sa chasse, semblant être décidé à tout prix de la saisir par l’arrière : ce deuxième essai est aussi manqué, car la Mouette de Bonaparte plonge vers l’eau tout en glissant à sa droite, à quelques centimètres seulement au-dessus de la surface liquide. Tenace, le Faucon pèlerin revient de plus belle et pourchasse sans arrêt la mouette, laquelle se fait rattraper, pour échapper de justesse aux serres de celui-ci, tout en se promenant dans les airs dans des virevoltes imprévisibles. Le faucon, épuisé, soudainement, la perd de vue, laquelle a su s’esquiver en se dirigeant vers la chute, et il abandonne après plusieurs minutes d’une chasse infructueuse : spectacle vraiment intéressant à regarder, d’autant plus que le dénouement est heureux pour la Mouette de Bonaparte.

 

      Par la suite, les investigations pour trouver le Bécasseau à échasses reprennent et dans ma lunette d’approche, je repasse sans cesse chacun des chevaliers présents, sans pour autant voir le bécasseau convoité. Mais, me souvenant d’une habitude ancrée dans celles du Bécasseau à échasses, soit celle de chercher sa pitance en ayant les pattes dans l’eau, je scrute la bordure aqueuse et dans les instants suivants, l’individu recherché est pris en flagrant délit, soit en bouffant avec les chevaliers, à quelques mètres seulement, justement dans l’eau; mon ami, informé sur-le-champ, prend plusieurs clichés de ce bécasseau envié, une première à vie pour lui : le but du voyage est atteint, tout en ayant assisté à un spectacle passionnant dans le monde des oiseaux, lequel fut offert par le Faucon pèlerin et la Mouette de Bonaparte.