DES ALGUES DE GLACE AU LAC

                                      (Source : Le Nouvelliste, 5 mars 2011)

 

                                               Texte de Michel Bourassa

 

         Le phénomène des algues de glace est connu depuis plus d’une vingtaine d’années dans les milieux marins des régions polaires. Ce que les scientifiques ignoraient jusqu’à récemment, toutefois, c’est que des communautés microbiennes abondantes vivent aussi sous le couvert de glace fluviale, en eau douce. C’est au lac Saint-Pierre, cet élargissement du fleuve Saint-Laurent, que la découverte a été faite par le professeur Jean-Jacques Frenette et son équipe du département de Chimie-Biologie de l’Université du Québec à Trois-Rivières. Cette nouvelle connaissance permettra de mieux comprendre le rôle des communautés microbiennes dans le réseau trophique en eau douce.

 

        Il faut dire que l’eau salée crée un phénomène qui lui est propre. Lorsque la glace se forme en milieu marin, le sel se sépare de l’eau, ce qui laisse dans le processus un nombre infini de petits canaux dans la glace. Ces canaux sont autant de niches pouvant être colonisées par divers micro-organismes; ce même genre de canaux ont aussi été trouvés dans la glace des milieux d’eau douce. Des recherches effectuées au lac Saint-Pierre révèlent que la face inférieure de la couche de glace qui se forme en hiver est elle aussi tapissée d’une riche colonie de micro-organismes qui logent dans ces canaux verticaux minuscules de 1à 5 millimètres de diamètre.

 

       On croit que ces algues de glace non seulement supportent la vie pendant l’hiver, mais peuvent fort probablement contribuer à mettre en place les conditions de vie de l’eau libre. Donc, elles ont un rôle extrêmement important à jouer, selon le chercheur Jean-Jacques Frenette. Ce qui peut fort probablement se produire au printemps, c’est que lorsque cette glace-là fond, les organismes présents dans la glace sont libérés dans l’eau libre et peuvent servir de source d’ensemencement des communautés microbiennes qui vont passer l’été. Quand elles sont libérées dans le milieu, elles peuvent commencer à se multiplier; les algues examinées à la microscopie, immédiatement après la fonte de la glace, étaient en parfaite santé. Reste maintenant à déterminer dans quelle mesure les communautés de poissons dépendent de cette ressource.

 

      Si l’on perd le couvert hivernal de glace à cause des changements climatiques « on perd un habitat » important, selon le professeur Frenette.