LES PERLES DE LA CORDE À LINGE

 

Article de Michel Bourassa

 

            En ce samedi de la première fin de semaine du mois de juillet 2011, après une matinée ensoleillée, le milieu de l’après-midi devient nuageux et le ciel s’assombrit rapidement tout en amenant quelques gouttes de pluie; ces petites fléchettes verticales, lesquelles se précipitent rapidement au sol, se transforment à la vitesse de l’éclair pour devenir des jets d’eau lancés par les nuages et aller s’échouer sur toutes les surfaces qui se retrouvent sur leur route et ce, sans exceptions.

 

           L’une de ces surfaces est une corde à linge, laquelle se trouve dans mon champ de vision, car, en ce moment, j’observe la mangeoire du voisin d’en face, directement à la même hauteur que ladite corde; l’abondante pluie continuelle amène une quantité incalculable d’eau sur le plancher de la corde et ce liquide aqueux glisse sur celle-ci d’une façon éphémère pour aussitôt se changer en des dizaines de perles nacrées, ces dernières rendues suspendues sous la cordée supérieure, s’y agrippant le temps où d’autres viendront les déloger : ladite lignée du haut est surchargée de ces nacres à l’allure d’opales ou de pierres de lune, faisant momentanément rêver à un trésor étendu sur une corde à linge magique. Par contre, l’alignement des gouttelettes sur le fil du bas est espacé, tantôt se côtoyant, tantôt s’éloignant, donnant l’illusion d’une rangée de dents du haut de tout jeune enfant, lequel perd ses dents de lait, une à une, dans ses premières années de vie.

 

         Ce spectacle inattendu va durer un bon trente minutes, parce que le ciel s’entête à envoyer ses larmes dans mon environnement, probablement jaloux de la présence trop prolongée du soleil lors des derniers jours; ses nuées, trop gonflées d’eau marquée d’humidité, n’en pouvaient plus de subir un tel sort et ledit ciel leur a permis de laisser subitement tomber cette lourdeur d’eau, résultat accumulé d’un trop plein de vapeur. Comme il se doit, après la pluie, le beau temps, ces rangées de perles, de nacres, d’opales, de perles de lune ou de dents de lait, comme vous le voulez, disparaissent assez rapidement avec la fin de la pluie et avec l’arrivée presque simultanée du vent et du soleil, deux éléments naturels très efficaces, lesquels permettent le renouvellement du cycle amenant à de futures pluies. En effet, un de ces jours pas trop lointain, avec la formation de la vapeur d’eau qui s’emparera de l’espace pour former de nouveaux nuages, lesquels, à leur tour, reviendront arroser la même corde à linge du voisin d’en face, celle-ci va encore recevoir cette visite quasi royale, avec des bijoux opalins formant le phénomène des perles d’eau venues de l’azur.