LE PIGEON VOYAGEUR, CE HÉROS

 

Article de Michel Bourassa

 

 

          Le pigeon voyageur (domestiqué depuis l’Antiquité), fait partie de l’espèce du Pigeon biset, notre éternel pigeon de ville et de notre vie de tous les jours, et lequel est, aujourd’hui, considéré comme une nuisance; mais par contre, celui-ci possède et a surtout possédé une excellente réputation par le passé en étant un porteur de messages qui ont changé le cours des guerres comme de certaines histoires d’amour. Comme son instinct remarquable le ramène toujours à son pigeonnier, le Pigeon biset est le candidat idéal pour de telles fonctions importantes, à la condition qu’il soit élevé dans le colombier du destinataire, pas trop longtemps cependant, pour qu’il n’élise pas domicile dans le colombier de transit.

 

          Le pigeon voyageur, capable de parcourir 800 kilomètres par jour, peut espérer vivre jusqu’à 25 ans, et pendant les guerres, les Allemands dressaient des faucons pour les attaquer, d’où la nécessité d’envoyer plusieurs pigeons en même temps lors des messages importants; les avantages d’utiliser le pigeon durant une guerre sont la discrétion (par rapport à une voiture, un avion ou tout autre moyen de locomotion, y compris l’homme), la difficulté de l’intercepter et à le distinguer de ses congénères sans message et les coûts peu onéreux pour la nourriture et l’élevage. Pendant la Première Guerre (1914-1918), au lieu de colombiers fixes situés très loin du front, l’armée française transforma des autobus en pigeonniers, lesquels pouvaient suivre les troupes; le haut des véhicules servait à accueillir les pigeons voyageurs tandis que le bas était réservé pour la nourriture et le soigneur. Affrontant les mêmes dangers que les hommes, certains pigeons ont été décorés comme des soldats. Ce fut le cas du célèbre Vaillant (matricule 787.15), dernier pigeon du fort de Vaux, lâché le 4 juin 1916 à 11h30 pour apporter à Verdun un ultime message du Commandant Raynal; un film d’animation américain du nom de Vaillant a d’ailleurs pour intrigue la vie de ces pigeons soldats et de leurs ennemis, les faucons allemands.

 

          De nos jours, dès la naissance, on équipe le pigeon d’une bague nommée « matricule » et il peut transporter des messages, des microfilms ou encore, des appareils photo à obturateur programmé; la colombophilie continue de se pratiquer comme loisir en Europe et la marine américaine met l’excellente vue de ces pigeons voyageurs à profit pour le sauvetage en mer en leur enseignant à réagir aux couleurs des gilets de sauvetages du haut de ses hélicoptères. Comme quoi, il vaut bien subir quelques inconvénients en acceptant la présence pas toujours souhaitée des Pigeons bisets, car ils pourraient peut-être bien un de ces jours nous sauver la vie, même collectivement.