Le troisième jour, il apparaît

 

À mes premières armes comme observateur, avec un manque d'expérience dans les techniques de repérage des oiseaux, je vais en payer le prix mais j'en suis sorti avec les grands honneurs lors de la saga suivante.

 

Par une journée du mois d'août, je promène les jumelles près des rives de la petite baie de Yamachiche, à la hauteur des joncs et, tout à coup, un petit oiseau nerveux surgit de ceux-ci pour, à peine marcher quelques mètres et y retourner aussitôt, en constatant ma présence; je surveille l'endroit de sa fuite en espérant une autre sortie dans les minutes à venir, ce qu'il fait, mais il ne me laisse pas le temps de lever mes 7 X 35, qu'il est déjà parti. Ce petit jeu dure environ trente minutes pour, enfin venir à bout de ma patience et je quitte. Le lendemain, sous des nuages et une fine pluie intermittente, je reprends où j'ai laissé pour voir cet oiseau sortir et se cacher, exactement comme la veille mais j'insiste, sans pour autant réussir, après au moins quarante-cinq minutes de guets et de frustrations; encore une fois, j'abandonne.

 

Le lendemain, pour une troisième fois, je reviens sur la scène du crime, si on peut dire, décidé à tout prix à l'identifier, même s'il pleut continuellement et que je deviens de plus en plus transi, la pluie étant un peu froide. Après environ quarante minutes à scruter obstinément le sol, à l'orée des herbes et des joncs, près du sable de la plage, par bonheur, enfin, une tête à l'extrémité d'un corps de plumes sort de sa cachette; avec sa poitrine chamois et surtout, avec son avant-sourcil orangé et la raie pâle au centre de la calotte, le " peureux " correspond au Bruant sauterelle, l'ayant déjoué, se pensant probablement seul.

 

Je retourne chez-moi, soulagé d'avoir mis un nom sur ce bruant très rusé, oubliant complètement que je suis détrempé: la piqûre de l'ornithologie m'a envahi.