D’OUEST EN EST

Venant de démarrer le moteur de mon embarcation, je m’engage dans la première courbe de la rivière, à quelques mètres seulement de chez moi, et ce, lentement, pour aussitôt couper le contact et me laisser glisser vers la rive opposée : un mouvement dans les arbustes de la côte représentant la silhouette d’un oiseau, apparence causée par un soleil près de l’horizon, m’incite à grimper en haut de celle-ci afin de tenter de trouver ce membre de la confrérie ailée. Malgré ma position précaire, après avoir rapidement quitté la barque, j’ai dans ma mire l’objet de ma convoitise, soit un oiseau qui est, à mon impression première en le voyant de face avec sa tête relevée, une Paruline couronnée; mais dès qu’il se baisse, le bec court et conique m’enlève cette idée pour me confondre, d’autant plus qu’il a le bec, la tête et même, lorsqu’il se penche complètement vers l’avant, le dos d’une couleur toute grise.

Même si je songe temporairement à une grive, c’est impossible et ce, à cause du bec et de la couleur grisâtre de la tête; il ne me reste qu’à investiguer dans les races des bruants en presque dernier recours et, tout à coup, je me souviens avoir vu un tel bruant dans mon guide des oiseaux et ce, en deux versions, mais le nom exact m’échappe. Après un ultime coup d’œil à cet individu aviaire, en prenant bien soin de saisir tous les détails possibles sur ladite espèce, je vais à mon travail et au retour, soit une heure plus tard, je vérifie dans mon livre et j’ai la confirmation que j’étais en compagnie d’un Bruant fauve, de la forme schistacea, race originaire de l’Ouest Canadien et des Rocheuses; quel périple pour aboutir ici, dans l’Est : il a assurément l’âme d’un intrépide grand voyageur!

 

 

 

RÊVE RÉALISÉ À MOITIÉ

Le soleil ayant commencé à descendre en ce début de soirée du mois de septembre, vers la fin de leur migration d’automne, les parulines deviennent plus rares et je m’avise, des bords du cours d’eau face au lac Saint-Pierre, soit la Petite rivière Yamachiche, à revenir à la maison car, déjà, une fraîcheur se fait sentir dans mon cou et sans attendre, j’entre dans ma chaloupe pour filer à toute allure sur les eaux de la rivière.

Dépassé le dernier pont de l’autoroute 40, un oiseau jaunâtre croise le devant de mon bolide, ce qui me fait appliquer les freins (si l’on peut dire) en coupant le contact du moteur pour me laisser glisser vers l’endroit où ledit oiseau a pu se percher; j’ai le temps de lever mes 7X35 sur les branches et de « tomber » directement sur l’individu en question, soit un Tangara écarlate femelle, facilement identifié grâce à son bec fort et pâle, et plus imposant que la Paruline jaune.

J’ai toujours souhaité observer un Tangara écarlate, ce qui est maintenant réalisé, même si ce n’est pas un mâle, lequel est beaucoup plus flamboyant avec son fameux rouge, mais ce sera sûrement pour un peu plus tard.

Et en effet, depuis ce temps (30 septembre 1995), j’ai eu la chance d’admirer à plusieurs reprises l’écarlate du mâle, toujours aussi éblouissant d’une fois à l’autre, tout en ayant amplement comblé le rêve réalisé à moitié de la première observation.